lundi 4 mars 2024

LA BRUME L'EMPORTERA de Stéphane Arnier



Éditions Mnémos
Illustration de Cyrielle Foucher
365 pages
22 euros




L'avis express de Dup sur La brume l'emportera de Stéphane Arnier

Pépite de l'imaginaire 2024 des éditions Mnémos, ce roman est un vrai bijou.
Et c'est un vrai one-shot !


L'AVIS DE DUP


Que j'aime ces romans où un des personnages, un des héros même, nous raconte son histoire. Moi je les appelle des romans à la Rothfuss... on a les références qu'on peut n'est-ce-pas ! 

Et ici, c'est annoncé dès le premier chapitre. Keb Gris-de-Pierre est au milieu d'un groupe de Ta'moaza, lui le Dak, alors que leurs peuples sont ennemis. Mais voilà, il connait leurs coutumes désormais et ils lui ont confié leur bâton-oiseaux. Celui-ci lui confère le droit de raconter une histoire sans que personne ne puisse lui couper la parole ni même se soustraire à son récit.

Et il a bien fait de s'emparer de ce pouvoir si particulier car il va leur raconter comment il a aidé Maramazoe à éradiquer la brume. Et dès qu'il prononce ce nom, toute l'assistance frémit, recule instinctivement. Maramazoe est muo moa : tabou. Sans le bâton-oiseaux il aurait été lynché sur place... sans grandes difficultés vu qu'il n'est qu'un Dak, frêle et malingre, et eux des Ta'moaza costauds, de deux têtes de plus que lui.

On découvre avec le récit de Keb, un continent qui se noie dans une brume épaisse qui monte sans arrêt et commence à menacer les hauteurs de sa montagne. À première vue, rien de bien méchant n'est-ce-pas ? Oui, sauf que cette brume avale tout, efface, vaporise les êtres vivants et même leurs constructions. Keb, qui était berger, n'a plus que son fidèle chien. Sa femme enceinte était en voyage sur la côte, la brume est arrivée de la mer. De ses montagnes, il a vu la ville se faire engloutir. Et maintenant, il cherche un chemin pour rallier un autre sommet, plus élevé. Il vient de perdre son chien qui s'est dissout dans la brume pour récupérer une volaille quand il est rejoint par une Ta'moaza, Mara. Elle aussi monte, mais son but est de rejoindre la responsable, celle qui a créé cette brume, sa fille. 

Ne sachant trop quoi faire de sa vie, Keb décide de la suivre, ce qu'il ne sait pas c'est que Mara est une fileuse et qu'elle l'a lié à lui avec un fil de brume. Ce qu'il ne sait pas non plus, c'est qu'en essayant de récupérer son chien, il est entré partiellement dans la brume et que depuis, il a la possibilité de passer dans le passé, 8 ans plus tôt, en retenant sa respiration. Et je vais arrêter là, car sinon ma chronique n'en finira jamais. Mais ne prenez pas peur, je ne vous ai résumé que le tout début, précisément je vous ai mené page 38. 

Ce roman est un mélange des genres fabuleux ! Stéphane Arnier nous plonge dans un univers au parfum de fin du monde. On pourrait l'étiqueter post-apo avec cette ambiance si particulière où l'humanité restante est en mode survie. Mais on est bel et bien dans un univers de fantasy avec des personnages ayant des pouvoirs magiques. Il développe un système de magie pour le moins déroutant, avec des bonds dans le passé, avec des liaisons brumeuses permettant de grimper comme une araignée sur une paroi verticale, avec des socles de téléportation existant sur certains sommets. 

C'est un récit tout simplement passionnant, prenant tantôt le temps pour nous décrire des paysages époustouflants, tantôt avec des accélérations fulgurantes lorsqu'il y a des bastons, car bien sûr ils vont avoir plus d'un bâton dans les roues en chemin, quand ce n'est pas le chemin lui-même qui pose problème. Les bastons avec les va-et-vient en apnée dans le passé pour échapper au danger du présent m'ont parfois causé quelques nœuds au cerveau pour visualiser les actions, mais je me suis rendue compte que j'étais moi aussi en apnée, plongée dans ma lecture !

On ne peut pas faire plus différent que les deux héros de ce roman, tant physiquement que moralement. Keb, est un vieux taiseux, solitaire et bougon, un berger quoi. Mara à l'inverse lui oppose sans cesse une confiance inébranlable en l'avenir, et avec le sourire. Ce qui va commencer par une association forcée va évoluer au fil de récit en une incroyablement belle amitié forgée sur le respect mutuel que chacun va acquérir, à son rythme. 

L'importance du passé est l'épine dorsale de ce roman, avec tous les questionnements qui surgissent si l'on avait la possibilité d'y modifier quelque chose et ses conséquences sur le présent. Le poids des choix de nos deux héros nous renvoie inexorablement aux nôtres et... c'est vertigineux !

La brume l'emportera est le bâton-oiseaux de Stéphane Arnier, et dès le premier chapitre il vous lie à lui et ne vous relâchera qu'au point final. C'est un profond coup de cœur et je ne peux que vous enjoindre à le découvrir.


1 commentaire:

Hermine H. a dit…

Entre ton avis et celui de l'Ours inculte, je suis très tentée ! :)