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lundi 30 janvier 2023

NUIT AMÉRICAINE de Pierre Rehov

 


Cosmopolis éditions
544 pages
22 euros





L'avis express de Dup sur Nuit américaine de Pierre Rehov

Une chronique d'un OLNI pour Bookenstock, je n'ai pas de libellé adapté !
Un film livre de gangsters, avec une superbe histoire d'amour bien poignante.


L'AVIS DE DUP



Il ne m'arrive pas souvent de sortir de ma zone de confort de lecture, je suis trop frileuse. Avec ce roman de Pierre Rehov, j'ai plongé et je suis encore incapable aujourd'hui de comprendre pourquoi ! Pourtant il y avait dans l'argumentaire que j'ai reçu un signal d'alerte rouge pour moi : "...., les dessous de la mafia et ses terribles lois,...". Je n'aime pas les polars et les thrillers qui parlent de mafia. Or donc, Nuit américaine n'est ni un polar, ni un thriller, ni un SFFF, et il parle de mafia ! Un OLNI qui devait se sentir bien à l'étroit dans ma PAL.

Et pourtant, j'ai été happée par cette lecture, obnubilée par le parcours de Fabio, un jeune italien que l'on découvre au début du roman. Révoltée aussi par les méthodes mafieuses (comme d'hab) et admirative de l'intelligence de Fabio pour les contourner tout en allant dans le sens du poil de son oncle, le grand manitou de l'est des États-Unis.

La particularité de ce livre, c'est que Pierre Rehov nous déroule son histoire comme si l'on était devant un grand écran. Une écriture très visuelle, très immersive, et il nous accapare complètement avec son personnage principal tellement solaire que l'on prend fait et cause pour lui et sa quête du bonheur et de la réussite.

Fabio, tout juste 16 ans, vit modestement dans un petit village italien, Fiumicino. Le weekend il fait ses fonds de poche pour prendre le train vers Rome, la ville, où il espère aller au cinéma. Son coup de foudre pour Rafaela, une jeune romaine de 16 ans aussi, amoureuse de cinéma également, va impacter sa vie. 

Mais, de retour à Fiumicino, pour aider un copain dans la mouise, il va s'impliquer dans un trafic mafieux qui tourne mal et pour sauver sa peau et celle de son pote, il commet un meurtre. Il lui faut donc passer sous les radars, fuir le pays et surtout ne rien dire à Rafaela pour qu'elle ne soit pas une cible elle aussi.

Il y aura ensuite New-York, Los Angeles, Vegas... Ce roman est construit comme une saga et se raconte difficilement. Il faut le voir le lire ! On nage dans le cinéma de Federico Fellini, et tous les aspects du cinéma sont décrits ici. D'un côté de la caméra comme de l'autre, c'est passionnant. 

Les thèmes abordés sont profonds et prennent bien aux tripes. Les frontières fluctuantes entre le bien et le mal, en fonction de la conscience de chacun. L'investissement de soi dans la réussite d'un projet, l'impact de cette passion pour le cinéma dans la vie professionnelle. Le choix à faire entre sa famille de coeur et celle de sang qui revient en permanence les narguer à chaque étape de la vie de Flavio et Rafaela. 

Le rêve américain dans toute sa splendeur, malgré l'injustice présente partout. Kennedy, Norma Jean, Nixon, Castro apparaissent dans ces lignes et permettent de se situer dans le temps. Et toujours en toile de fond la menace mafieuse, oscillante, fluctuante, pernicieuse et au final, implacable.

Nuit américaine est un roman mêlant romantisme, polar et domination territoriale. Un vrai film de gangsters en noir et blanc que je ne peux que vous conseiller de découvrir. 

lundi 28 novembre 2022

PAPILLON DE NUIT de R. J. Ellory [Audio]

 


Éditeur Audible*
Lu par Pascal Casanova
Durée 15h 12 mn
525 pages la version papier chez Sonatine ;)

*Apparemment ce titre n'existe plus au catalogue d'Audible.




L'avis express de Dup sur Papillon de nuit de R.J. Ellory

Coup de coeur absolu pour ce roman noir, beaucoup moins connu que Seul le silence et pourtant tout aussi puissant !


L'AVIS DE DUP



R.J. Ellory est pour beaucoup le maître des romans noirs. Ce Papillon de nuit est son premier roman publié en 2003. Il faudra attendre 2015 pour que Sonatine nous l'offre en français. Alors que depuis 2008 et le best seller Seul le silence toutes les parutions de l'auteur font un tabac des deux côtés de l'Atlantique. C'est un mystère pour moi, car Papillon de nuit est vraiment de la même veine ! Une lecture écoute poignante, portée par un personnage tout aussi fort.

Daniel est blanc, Nathan est noir. Ils avaient alors six ans, lorsqu'ils ont partagé un sandwich au jambon sur les bords d'un lac. Et depuis cette année de 1952 ils ne se sont jamais quittés. Alors pourquoi Daniel se retrouve-t'il aujourd'hui, nous sommes alors dans les années 80, dans le couloir de la mort pour le meurtre de Nathan ?

Un mois avant son exécution Daniel va être présenté au père John Rousseau pour entendre sa confession. Le récit alternera entre le quotidien de son incarcération d'une part : on y abordera bien évidemment des réflexions sur la peine de mort. Et d'autre part les flash-backs contés par Daniel qui nous entraînerons dans les années 60. Ellory va mêler la grande Histoire et la petite, comme il sait si bien le faire. 

Ces gamins ont grandi dans un monde où la ségrégation est encore bien ancrée dans les mentalités. Et pourtant on voit grandir cette amitié puissante face à l'adversité et la paranoïa. Jeunes adultes la menace de la conscription les verront fuir ensemble leur ville, leur famille. L'Amérique est en crise, l'assassinat de Kennedy, la guerre du Vietnam, la lutte de Martin Luther King et le Ku Klux Klan, les complots politiques et le Watergate...

Tout au long de ces 15 h d'écoute, la voix de Pascal Casanova, grave et profonde, parfaite pour ce roman, nous conte un monde de violence où prend vie un récit d'amitié, d'amour et de mort. Il prend le temps, posément, car effectivement il y a peu d'action dans le texte de Ellory hormis quelques bastons ou bien des fuites de nos deux amis. Cette descente aux enfers de Daniel n'en reste pas moins un récit captivant, bouleversant qui m'a pris aux tripes du début à la fin.

Daniel Faure est un personnage de R.J.Ellory aussi inoubliable que l'était Joseph Vaughan de Seul le silence. Des personnages apportant la lumière dans un récit d'une profonde noirceur. Et le lecteur se retrouve tel un papillon de nuit, à être irrésistiblement attiré par cette vive clarté brillant dans l'obscurité. 

 

lundi 14 novembre 2022

SEUL LE SILENCE de R.J. Ellory [Audio]

 

SEUL LE SILENCE

R.J. ELLORY




Lu par : Olivier Chauvel
Durée : 15 h et 11 min
Version intégrale Livre audio
Date de publication : 21/12/2017
Langue : Français
Éditeur : Audible Studios






L'avis express de Dup sur Seul le silence de R.J. Ellory


Une écoute touchante et bouleversante !




L'AVIS DE DUP




Commençons par le plus drôle, mais le plus affligeant également. En même temps on dit qu'un moment de honte est vite passé... Or donc, j'ai écouté ce monument de R.J. Ellory en ce début d'été et j'ai franchement bien apprécié ces 15 heures passées en compagnie de Joseph Vaughan joué par Olivier Chauvel. Un Joseph Vaughan que j'avais l'impression de découvrir. Oui, vous avez bien noté l'imparfait... parce que lorsque je me suis mise en condition pour écrire cette chronique, comme je le fais à chaque fois, je vais voir dans la biblio du blog ce que je peux dire à propos de l'auteur. Et voilà, je suis tombée sur MA chronique de ce roman !!! Ok, ça remonte à 10 ans, mais tout de même, pas un seul instant je n'ai eu cette sensation de déjà vu, déjà lu ! 😱😱😱😭

Maintenant, ça va être encore plus drôle, parce que vous allez pouvoir comparer ! Visiblement je n'avais pas spécialement accroché à l'époque alors qu'aujourd'hui, je comprends fort bien pourquoi il est classé comme THE roman incontournable de cet auteur.

R.J. Ellory nous propose avec ce roman d'une noirceur incroyable une véritable fresque démarrant au milieu des années 40-50 et couvrant toute la vie d'un homme devenu écrivain qui s'exprime à l'aube de sa vie, Joseph Vaughan donc. Un homme qu'on pourrait qualifier comme étant la poisse incarnée. Son récit démarre alors qu'il n'est pas encore un adolescent et le voilà confronté à la mort de son père. Les années qui vont suivre vont le voir marqué par les découvertes successives de corps de fillettes massacrées et violées aux alentours de Augusta Falls, une petite ville de Georgie où il est né.

Marqué, pour ne pas dire traumatisé, alors que certaines lui étaient proches, le parcours de ce serial killer jalonnera les grandes étapes de sa vie. Une vie d'une extrême noirceur (monsieur poisse je vous disais), mais éclairée de temps à autre de superbes rayons de soleil. Un homme qu'on ne peut qu'aimer, quelque soit le moment de sa vie, enfant, ado, jeune adulte, homme mûr puis vieillard. Et pas seulement à cause des embûches sur son parcours de vie, essentiellement par la profondeur qui se dégage de ce personnage.

Seul le silence est vendu pour un thriller, et oui, il en a certains aspects. Mais il est pour moi (aujourd'hui 😬) bien plus que ça. Un roman social, un roman d'ambiance mais surtout un roman d'une profondeur psychologique incroyable. Comment ai-je pu passer à côté de cela reste un mystère. Son personnage m'a profondément touchée, son histoire m'a bouleversée et me hantera longtemps. Je remercie infiniment Olivier Chauvel, le narrateur de cet audio de me l'avoir fait redécouvrir de façon aussi magistrale. 

Je peux même constater qu'au sujet de ce narrateur mon avis n'a pas changé, je l'avais déjà beaucoup apprécié dans l'audio du thriller Parce qu'elle m'aime de Mark Edwards. Je vais donc continuer à explorer sa production d'autant qu'il a couvert un cycle bien classique que je n'ai pas encore à mon actif : Eragon !!!




lundi 23 mai 2022

DUCHESS de Chris Whitaker

 


Éditions Sonatine
519 pages
23 euros





L'avis express de Dup sur Duchess de Chris Whitaker

Un roman noir magistral à lire absolument !


L'AVIS DE DUP




Il est des livres qui vous assènent un véritable ko émotionnel et Duchess en fait partie. Il m'a fallu plusieurs jours après l'avoir refermé pour être capable de reprendre une autre lecture... Quelle puissance !

Duchess, c'est le prénom de la gamine, une pré-ado de 13 ans que l'on va suivre. Une môme incroyablement forte, qui endosse le rôle de mère pour son petit frère Robin, 5 ans. Leur mère Star s'avérant incapable de les élever, noyant son mal-être dans l'alcool... Quant au père, Duchess n'a jamais réussi à savoir son identité.

Une vie vraiment pas facile, dans la misère et le dénuement le plus souvent. Mais Duchess veille, surprotège son frangin, n'hésitant pas une seconde à jouer des poings si l'on s'en prend à lui, n'hésitant pas se sacrifier, voire à chaparder pour qu'il mange à sa faim. Elle voue à Robin un amour inconditionnel incroyable qui apportera des passages émotionnels profonds en cours de lecture. Rien que d'en reparler, j'ai à nouveau des frissons qui dévalent mon échine.

Mais voilà, elle n'a que 13 ans et c'est bien jeune devant toutes les tuiles qui vont survenir. La construction de ce personnage est quand même magistral, car c'est malgré tout un anti-héros. Elle est cash, grossière, irrévérencieuse. Elle n'a pas froid aux yeux et peut être une véritable teigne.

Duchess est avant tout un roman noir, avec une intrigue qui va se développer au fil des pages. Star, Martha, Vincent et Walk étaient des amis d'enfances à Cap Heaven. Ils avaient 17 ans lorsque Vincent a pris 10 ans de prison pour le meurtre accidentel de Sissy, la petite soeur de Star. Et 20 ans de plus pour le meurtre d'un co-détenu les premières semaines de son incarcération. 17 ans, incarcéré avec des adultes...

Walk est devenu l'inspecteur de la ville et veille de loin sur Star qui "élève" seule ses enfants, Martha exerce le métier d'avocat loin de Cap Heaven. Vincent vient de sortir de prison et peu de temps après un meurtre a lieu dans la paisible bourgade de Cap Heaven... un coupable tout désigné. Walk qui n'a jamais mené d'enquête réelle en 30 ans de service s'y colle, mais par la bande, il est trop impliqué. 

Voilà l'intrigue, grossièrement simplifiée s'entend. C'est tellement plus complexe, tout se croise et s'entrecroise, c'est du grand art. Ce qui est magistral également dans ce roman, c'est que tous ces personnages, Walk, Vincent, Martha, le grand-père, en plus de Duchess, sont incroyablement touchants, émouvants. Chaque portrait est creusé, leur psychologie bien détaillée, aucun n'est caricatural. Si ce ne sont pas des casseroles qu'ils traînent, ce sont des plaies à vifs. Il en découle un nombre incalculable de passages poignants, parfois beaux à en pleurer.

Duchess de Chris Whitaker est une oeuvre d'art du roman noir que je conseille fortement. J'ai eu les tripes nouées du début jusqu'à la dernière ligne de ce roman. Il rentre avec fracas dans mon top three des romans noirs à lire et à relire, qu'il partage avec Meurtres pour rédemption de Karine Giebel et Papillon de nuit de RJ Ellory qu'il faudra que je me décide un jour à chroniquer ! Amateurs du genre, ne faites pas l'impasse sur ce roman ! 


jeudi 10 décembre 2020

L'HOMME CRAIE de C. J. Tudor [Audio]

 



L'homme craie
Lu par : Ronan Ducolomb
Durée : 9 h et 44 min





L'avis express de Dup sur L'homme craie de C. J. Tudor

Un roman noir qui mérite d'être découvert, mais par le biais d'un autre support !


L'AVIS DE DUP


C'est au cours de l'été de ses 12 ans qu'Eddie rencontre l'Homme craie qui vient d'arriver en ville et qui sera professeur d'anglais dans son collège. Un homme particulièrement remarquable au sens littéral car celui-ci est albinos. S'il l'a baptisé l'Homme craie c'est parce que cet homme est artiste à ses heures perdues, c'est un pastelliste qui créé de magnifiques tableaux avec des pastels secs qui ressemblent à des craies.

Cela a donné l'idée à Eddie d'instaurer un système de communication avec les amis de sa bande, trois autres garçons et une fille. Chacun a une couleur de craie et gribouille au sol des messages codés composés de bonhommes bâtons associés à certains sigles. Pour se donner rendez-vous quelque part essentiellement d'ailleurs. 

C'est à la fin de cet été qu'Eddie et ses copains découvriront le cadavre d'une jeune fille dans la forêt, en suivant une piste de bonhommes en craie. Ils ne vont plus beaucoup se voir après cette découverte et cela va être la rentrée des classes. L'enquête de la police aboutira à l'Homme craie, ce dernier s'étant suicidé laissant chez lui une preuve évidente de sa culpabilité.

Et puis nous retrouvons Eddie trente ans plus tard, il est professeur d'anglais dans ce même collège, le seul de cette petite ville. Il vit seul dans la maison de ses parents, son père est décédé après un pénible Alzheimer et sa mère partie vivre ailleurs. Pour tromper sa solitude, il loue une chambre à une jeune fille. Mais un jour il reçoit une lettre avec un bout de craie... Eddie va se replonger dans son enfance, cette année là, et détricoter ses souvenirs.

Un récit qui alterne sur une double temporalité, menée de main de maître. Mais le plus remarquable est cette capacité qu'a eu C. J. Tudor à entrer dans la tête d'un ado de 12 ans, puis d'un homme de 42 ans. Car les récits sont à la première personne du singulier. L'ambiance étouffante des petites villes où tout le monde se connait est parfaitement retranscrite et rajoute de l'oppression dans cette histoire.

Cependant, malgré l'emploi du je, j'ai eu beaucoup de mal à éprouver de l'empathie pour Eddie, et même pour les autres personnages. C'est bien dommage car l'intrigue de l'autrice est incroyablement sophistiquée et j'avoue que je suis restée comme deux ronds de flans en découvrant la vérité à la toute fin. Le récit reste donc extrêmement prenant malgré ce handicap.

Pour parler de l'aspect audio de cette écoute, j'ai là aussi un bémol, et un gros ! Le narrateur en soi est bon, sauf qu'il utilise exactement la même voix pour l'Eddie de 12 ans que celui de 42. Cela nécessiterait juste un petit temps d'adaptation à chaque début de chapitre... sauf qu'il faut rajouter à cela un montage spécial, pour ne pas dire mauvais, qui fait qu'il n'y a aucun temps mort lors de ces changements de temporalité. C'est assez perturbant et rend l'audition plus que pénible.

L'Homme craie est un excellent roman noir, brillant par son intrigue tarabiscotée, manquant un peu d'empathie pour en faire un coup de coeur, mais qui vaut franchement la peine d'être découvert pour les amateurs du genre. Je me pencherai certainement un jour sur les autres écrits de cette dame C. J. Tudor. Mais un seul conseil, lisez le, fuyez l'audio !



lundi 14 janvier 2019

L'EMPREINTE de Alexandria Marzano-Lesnevich




Éditions Sonatine
470 pages
22 euros

Ce roman vient de remporter le Prix du Livre étranger 2019
remis par France Inter et Le Journal du Dimanche.




4ème de couv :

Étudiante en droit à Harvard, Alexandria Marzano-Lesnevich est une farouche opposante à la peine de mort. Jusqu’au jour où son chemin croise celui d’un tueur emprisonné en Louisiane, Rick Langley, dont la confession l’épouvante et ébranle toutes ses convictions. Pour elle, cela ne fait aucun doute : cet homme doit être exécuté. Bouleversée par cette réaction viscérale, Alexandria ne va pas tarder à prendre conscience de son origine en découvrant un lien tout à fait inattendu entre son passé, un secret de famille et cette terrible affaire qui réveille en elle des sentiments enfouis. Elle n’aura alors cesse d’enquêter inlassablement sur les raisons profondes qui ont conduit Langley à commettre ce crime épouvantable. Dans la lignée de séries documentaires comme Making a Murderer, ce récit au croisement du thriller, de l’autobiographie et du journalisme d’investigation, montre clairement combien la loi est quelque chose d’éminemment subjectif, la vérité étant toujours plus complexe et dérangeante que ce que l’on imagine. Aussi troublant que déchirant.





Les Éditions Sonatine l'avaient clairement annoncé, ils changeaient de ligne éditoriale. Enfin plus exactement ils l'élargissaient. Ce ne sera plus que des thrillers purs et durs. L’empreinte est l’exemple type de ce changement ! Je suis d’ailleurs bien incapable d'étiqueter ce roman dont je vais essayer de vous parler.

C’est un roman surprenant, captivant car une fois commencé on ne peut plus le lâcher. Pourtant il n’est en aucun cas bourré de suspense, non. Ce n’est pas un page turner et pourtant on les tourne toutes inexorablement ces pages. Peut-être parce que c’est une histoire vraie. L’autrice se met en scène, ne change ni son nom ni son prénom, elle nous expose sa vie, son enfance, son parcours. Son récit de vie est emmêlé avec celui d’un autre homme Rick Langley, un meurtrier pédophile. Et petit à petit on comprend l’impact qu’à eu ce dernier sur la vie d’Alexandria, alors que leurs chemins ne se croisent qu’une seule fois. Parce que c’est elle également qui nous raconte la vie, l’enfance et le parcours de Rick. Elle s'est appuyée sur les tonnes de dossiers médicaux, sociaux, judiciaires et rapports de police le concernant. Elle a enquêté, questionné les proches, les voisins, pratiquement toutes les personnes ayant vécu de près ou de loin avec Rick Langley. Et dans son récit, elle nous prévient lorsqu’elle a été obligée d’inventer un peu, pour les besoins de la narration. Oh pas grand-chose. Par exemple la couleur de la robe de la mère de Rick, qu’elle empreinte dans ses souvenirs des robes de sa grand-mère.

Alexandria aurait pu avoir une enfance de rêve, avec deux parents avocats, une fratrie aimante. Elle aurait pu oui, si elle et sa petite soeur n’avait pas été victime de pédophilie violente dès cinq ans par leur grand-père maternel. A chaque sortie des parents, les grands-parents étaient baby-sitters... Et pour enfoncer le clou, une famille qui décide de taire le délit une fois la chose enfin avouée par les enfants quelques années plus tard. Je dis violente, mais cela nous est conté avec beaucoup de pudeur. On ne le comprend que bien après, au détour d'un examen gynécologique alors qu'Alexandria à 30 ans !

Là-dessus vous rajoutez à son histoire une conviction profonde de suivre le chemin de ses parents, le droit, pour lutter contre la peine de mort. Premier stage qu’elle fait, premier dossier, celui de Rick Langley et c’est le cataclysme. Le résultat : ce roman.

Sujet bien difficile, ô combien casse-gueule, maîtrisé ici avec brio. On déglutit plus d’une fois, je vous le promets, et pourtant jamais elle ne dérape. Ces deux récits sont imbriqués à la perfection, chaque chapitre contient un élément, une phrase qui pousse à vouloir en savoir plus, c’est parfaitement maîtrisé. Le ton employé est froid évidemment, mais c’est comme si l’auteur ne voulait pas de l’empathie du lecteur. Que le lecteur reste la tête froide pour juger, analyser les faits, les conséquences. Et je dois dire que c’est mission accomplie. Je suis bluffée et admirative, même si j’hésite à le conseiller vu le sujet. Une chose est sûre, je ne regrette absolument pas ma lecture ! Ce livre m’a touché profondément et c’est mon premier coup de cœur de l’année 2019.


vendredi 30 mars 2018

TOUTES BLESSENT, LA DERNIÈRE TUE de Karine Giebel





Éditions Belfond
736 pages
21,90 euros


4ème de couv :

Maman disait de moi que j'étais un ange.
Un ange tombé du ciel.
Mais les anges qui tombent ne se relèvent jamais...
Je connais l’enfer dans ses moindres recoins.
Je pourrais le dessiner les yeux fermés.
Je pourrais en parler pendant des heures.
Si seulement j’avais quelqu’un à qui parler…


Tama est une esclave. Elle n’a quasiment connu que la servitude. Prisonnière de bourreaux qui ignorent la pitié, elle sait pourtant rêver, aimer, espérer. Une rencontre va peut-être changer son destin…
 
Frapper, toujours plus fort.
Les détruire, les uns après les autres.
Les tuer tous, jusqu’au dernier.


Gabriel est un homme qui vit à l’écart du monde, avec pour seule compagnie ses démons et ses profondes meurtrissures.
Un homme dangereux.
Un matin, il découvre une inconnue qui a trouvé refuge chez lui. Une jeune femme blessée et amnésique.
Qui est-elle ? D’où vient-elle ?
 
Rappelle-toi qui tu es. Rappelle-toi, vite !
Parce que bientôt, tu seras morte.






Tama était une petite fille sans histoire et très sage, comme aurait pu dire Jean-Jacques Goldman... mais c'est Karine Giebel qui va nous le dire. Et immanquablement on va s'y attacher tout de suite à cette petite marocaine qui a déjà eu un parcours de vie pas facile. Elle perd sa maman à cinq ans, son père se décharge d'elle en la confiant à sa tante pour refaire sa vie. Je savais pourtant qu'il ne fallait pas que je m'attache, oui je le savais... Mais la plume de l'auteur est ainsi faite que c'est impossible. Je défie quiconque de ne pas aimer cette môme, puis cette ado, et enfin cette jeune femme qu'elle deviendra.
À huit ans Tama est vendue par son père à Mejda pour "lui donner une éducation et la chance d'aller à l'école en France". Mais voilà, Mejad va la déposer directement au sortir de l'aéroport dans une famille Franco-Marocaine où elle sera la bonne à tout faire. Privée de tout, dormant dans la buanderie non chauffée et ne mangeant que les restes, quand il y en a... Et ce n'est que le début, le tout début d'une longue série de supplices que va subir Tama.

Mais dans ce roman il n'y a pas que Tama, on a aussi Gabriel. Un homme d'une cinquantaine d'années qui vit dans un hameau déserté et perdu dans les Cévennes. Il n'a pour seule compagnie que son chien, ses deux chevaux et ses fantômes. On comprend très vite que c'est un assassin, une sorte de tueurs à gages... sans gages : un nom, une adresse, il s'y rend, repère sa cible et l'élimine. Froidement, sans remord. Et là encore, malgré tous les ingrédients accablants amers ou acides utilisés pour le découvrir, on sent que la mayonnaise prend, que l'on s'y attache petit à petit.
Et puis un jour, une belle jeune femme, blessée, mourante et amnésique débarque chez lui et vient perturber son quotidien, ses certitudes...

Les chapitres vont alterner entre Tama et Gabriel. On se doute bien que la fin du trajet de Tama sera le début du trajet de Gabriel. On a hâte de voir la jonction, hâte qu'enfin cesse le calvaire de l'une et commence la rédemption de l'autre. Les chapitres défilent à une vitesse ahurissante, il ne m'aura fallu que deux jours pour avaler ce pavé, que dis-je, ce parpaing.
La construction de cette histoire est magistrale, on assiste à des changements de directions radicaux du parcours de Tama, qui va aller de Charybde en Scylla, puis être sauvée par Izri, le fils de Mejda, puis... arf, c'est indescriptible ! La parenthèse Izri fait du bien, mais elle fait peur aussi, parce qu'elle est beaucoup trop loin de la fin… Les coups de théâtre sont nombreux, certains, peu, heureux.

Avec ce roman Karine Giebel dénonce haut et fort un esclavage moderne qui existe hélas aujourd'hui un peu partout, pas qu'en France. C'est une réalité, cachée bien entendu, mais qui existe partout autour de nous, dans des maisons cossues comme dans des cités défavorisées. Dans ce roman il y a beaucoup de maltraitance, beaucoup de violence, mais aussi beaucoup d'amour dans ce qu'il a de plus pur. J'aime ces livres qui, en plus de nous embarquer complètement dans leur histoire, prennent faits et causes pour dénoncer, pour nous ouvrir les yeux sur une réalité bien sombre de notre quotidien. Karine Giebel rejoint en cela Olivier Norek qui lui aussi n'y est pas allé par quatre chemins dans Entre deux mondes.

Toutes blessent, la dernière tue est un roman noir magistralement bien mené par Karine Giebel qui n'a plus à prouver qu'elle est maître en la matière. Est-ce que Tama délogera Marianne de Meurtres pour rédemption dans mon coeur ? Et bien non, mais à l'image d'une soeur elle y prendra la même place. Comme une mère pour ses enfants, je les aimerai autant mais différemment. Quant à vous, je ne saurais vous conseiller l'un ou l'autre de ces deux livres, donc ce sera les deux !
ÉNORME COUP DE COEUR !





jeudi 8 février 2018

JUSTE APRÈS LA VAGUE de Sandrine Collette





Éditions Denoël
Collection Sueurs froides
301 pages
19,90 euros


4ème de couv :

Il y a six jours, un volcan s’est effondré dans l’océan, soulevant une vague titanesque, et le monde a disparu autour de Louie, de ses parents et de ses huit frères et sœurs. Leur maison, perchée sur un sommet, a tenu bon. Alentour, à perte de vue, il n’y a plus qu’une étendue d’eau argentée. Une eau secouée de tempêtes violentes, comme des soubresauts de rage. Depuis six jours, ils espèrent voir arriver des secours, car la nourriture se raréfie. Seuls des débris et des corps gonflés approchent de leur île.
Et l’eau recommence à monter. Les parents comprennent qu’il faut partir vers les hautes terres, là où ils trouveront de l’aide. Mais sur leur barque, il n’y a pas de place pour tous. Il va falloir choisir entre les enfants.







On ne sait jamais à quoi s'attendre avec Sandrine Collette. Chaque nouveau roman est radicalement différent du précédent. Inclassable. Une seule chose est sûre cependant : elle vous prend par la main, vous entraîne sans jamais vous lâcher, même quand vous le souhaitez. Parce que des pauses, au milieu de cette lecture, j'aurais vraiment voulu en faire. Pour simplement penser à autre chose, pour apaiser l'angoisse sourde et profonde qui m'a envahie dès le prologue. Car oui, dès le prologue j'ai eu le coeur explosé. Je savais que ce roman serait déchirant.

Je me souviens que pour Six fourmis blanches j'avais prévenu : "équipez-vous pour les grands froids". Mais ici, je ne peux même pas vous dire d'enfiler un gilet de sauvetage. Vous allez couler, comme moi, submergé par les éléments qui se déchaînent dans ces pages, le cœur plombé par les décisions et les conséquences. Relisez donc la 4ème de couv… voilà, vous avez compris. Et encore ceci ne concerne que la vingtaine de pages du prologue.

Et le roman commence. Sandrine Colette s'occupe dans une première partie des trois gamins délaissés sur l'île. Ils se réveillent un matin et avant même de constater le départ des autres ils savent que quelque chose ne va pas : cela ne sent pas les bonnes odeurs du petit déjeuner. Un petit mot de la mère - Pas assez de places - Ils reviendront les chercher dans 15 jours - Elle les aime. Oui mais, pourquoi eux ? Pourquoi les trois du milieu ? Parce qu'ils sont ratés ? Louie avec sa jambe de travers, Perrine avec son oeil crevé, Noé qui ne grandit pas ? Ils s'organisent tant bien que mal. Louie, 11 ans, endosse le rôle d'aîné, de référent. Et l'eau qui continue de monter…
Extrait page 113 (les dernières lignes de la première partie)
Un piquet, c'est une journée. Louie, les pieds dans l'eau, compte les pas entre les deux derniers, les reproduits sur la terre : il pose un caillou au bout de son orteil.
Là, ce sera demain.
Et là, après-demain.
Dans trois jours, la mer arrivera ici.
- Mais, dit Noé, ici c'est le toit de la maison.
Louis a mis les mains dans son dos et contemple l'horizon, songeur.
- Eh bien tu vois. Dans deux jours, on dormira dehors en haut de la colline, et dans trois jours, on sera noyés.

La deuxième partie sera consacrée au voyage en barque du reste de la famille. Les deux grands, les quatre petites et les parents. La mère qui rumine l'abandon de ses trois enfants, le père qui culpabilise. Surtout qu'il se rend compte que l'eau continue de monter…
Et les éléments qui se déchaînent aussi bien sur l'île que sur l'eau. Je peux vous dire qu'il faut avoir le coeur bien accroché. Sandrine Collette m'avait déjà fait ressentir le vertige, là j'ai eu le mal de mer. Moi qui ai toujours ressenti un vague malaise sur une plage face à l'immensité de la mer, je ne vous raconte pas sur une barque ! Les épreuves se succèdent pour tous. l'auteur ne leur épargne rien, c'est souvent dramatique.

Et enfin, pour la troisième partie, on retourne sur l'île, vers nos trois petits abandonnés. La machine Collette passe en mode essorage rapide. Que d'épreuves pour ces bouts de choux !

Comme je le disais en introduction, ce nouveau roman de Sandrine Colette est un inclassable. Hormis le fait qu'il est dur, qu'il est noir, il touchera forcément chaque lecteur. Parce qu'il touche au plus profond de notre humanité, parce qu'il développe et magnifie toutes nos émotions. Parce qu'il prend aux tripes de la première à la dernière ligne. J'ai trouvé également que l'écriture de l'auteur évoluait. C'est plus sec malgré des phrases longues, c'est sans fioriture, ça tape dur.
Extrait page 279
Ou eux tous ensemble, parce que cela en fait des difformités quand on les met l'un à côté de l'autre, et il y aurait de quoi en rire en effet, si ce n'était pas si triste, on n'y prêterait à peine attention, peut-être un jour on se dirait, oui que quelque chose cloche chez ces trois là, que la nature ou le destin aurait pu s'abstenir - n'est-ce pas la raison pour laquelle à ce sont eux qui sont restés sur l'île, eux et pas les autres, pas Liam et Matteo, et pas Émilie, pas Sidonie, pas Lotte et pas Marion, juste eux, le boiteux la borgne et le nain.
Trois petites erreurs.
Et puis s'en vont.
Juste après la vague est un incontournable, IL FAUT LE LIRE. C'est un immense coup de coeur, sans aucun doute mon préféré. Il faut que je laisse décanter un peu pour me prononcer. Une histoire profondément touchante que l'on vit au plus proche de ses personnages, de ces gens, jeunes, moins jeunes ou vieux, qui se surpassent, par nécessité, par volonté, par humanisme. Une fin magnifique qui vous cueille par surprise et vous accroche enfin un sourire.


Un thriller/polar pour le challenge de la Licorne



lundi 13 mars 2017

LES LARMES NOIRES SUR LA TERRE de Sandrine Collette




Éditions Denoël
Collection Sueurs froides
334 pages
19,90 euros




4ème de couv :

Il a suffi d’une fois. Une seule mauvaise décision, partir, suivre un homme à Paris. Moe n’avait que vingt ans. Six ans après, hagarde, épuisée, avec pour unique trésor un nourrisson qui l’accroche à la vie, elle est amenée de force dans un centre d’accueil pour déshérités, surnommé «la Casse». La Casse, c’est une ville de miséreux logés dans des carcasses de voitures brisées et posées sur cales, des rues entières bordées d’automobiles embouties. Chaque épave est attribuée à une personne. Pour Moe, ce sera une 306 grise. Plus de sièges arrière, deux couvertures, et voilà leur logement, à elle et au petit. Un désespoir. Et puis, au milieu de l’effondrement de sa vie, un coup de chance, enfin : dans sa ruelle, cinq femmes s’épaulent pour affronter ensemble la noirceur du quartier. Elles vont adopter Moe et son fils. Il y a là Ada, la vieille, puissante parce qu’elle sait les secrets des herbes, Jaja la guerrière, Poule la survivante, Marie-Thé la douce, et Nini, celle qui veut quand même être jolie et danser. Leur force, c’est leur cohésion, leur entraide, leur lucidité. Si une seule y croit encore, alors il leur reste à toutes une chance de s’en sortir. Mais à quel prix? Après le magistral Il reste la poussière, prix Landerneau Polar 2016, Sandrine Collette nous livre un roman bouleversant, planté dans le décor dantesque de la Casse.




L'avis de Dup :

Déjà avec son roman précédent Il reste la poussière, Sandrine Collette s'était éloignée des thrillers, aujourd'hui avec Les larmes noires sur la Terre, elle tourne résolument le dos à ce genre alors même qu'elle reste publiée dans la collection Sueurs froides. Point de sueur, ni de stress pourtant pour le lecteur dans les pages de ce nouveau livre. L'auteur propose un roman puissant et profondément noir.

Moe, une tahitienne de tout juste 20 ans a fait le choix de quitter son île pour rejoindre l'hexagone en suivant Rodolphe, des étoiles dans les yeux à la simple évocation de la France, Paris, la tour Eiffel... Les étoiles vont vite s'éteindre lorsqu'elle va se retrouver dans un village, isolée et méprisée à cause de la couleur de sa peau. Coincée entre un Rodolphe qui lui préfère ses bières et la grand mère acariâtre et pleine d'escarres qu'elle doit soigner. Les bals des samedis soirs vont lui apporter un peu de folie et... un gamin.

Lorsque les coups vont commencer à pleuvoir, Moe choisit de claquer la porte, acceptant l'hébergement proposé par Jéhane, une fille rencontrée à un bal. Seulement à trois dans un studio minuscule, la tension va très vite monter et Moe va se retrouver à la rue avec son bébé. Les services sociaux vont finir par leur mettre la main dessus et les expédier dans un centre d'hébergement... euh spécial et tout droit sorti de l'imagination de l'auteur.

Une immense casse automobile encerclée de hauts grillages. Son logement, une 306 grise. Ses voisines, cinq femmes qui vont les accueillir, la guider et lui apprendre les règles dures des lieux. Qui vont se raconter également, et là on comprend le vieil adage populaire qui dit qu'il y a toujours plus malheureux que soi. Malgré tout, Moe n'a toujours qu'une idée en tête, se faire de l'argent pour pouvoir sortir et retourner sur son île. Ses choix sont de plus en plus réduits et la dégringolade s'accentue. Mon Dieu, Sandrine Collette ne lui épargne rien, c'est un puits sans fond dans la noirceur. Et le lecteur rame, rameur, ramer.

Ce qui fera la force de ce roman ce sont ces liens si particuliers qui vont se tisser entre Moe et ces femmes : Ada, Poule, Jaja, Marie-Thé et Nini-Peau-de-Chien. Ce n'est pas de l'amitié, non, c'est beaucoup plus fort que ça. Ce roman est une véritable ode à la solidarité qui se construit sur les galères et les tuiles. Les élans d'entraide entre ces laisser-pour-compte apporteront un peu de lumière, comme des lueurs vacillantes de bougies, au milieu de ténèbres.

Avec son écriture toujours aussi puissante, Sandrine Collette embarque son lecteur dans une valse sombre, que j'aurai presque qualifiée de macabre s'il n'y avait pas eu l'épilogue qui vient quand même panser notre âme meurtrie par ce récit. Une lecture très belle, mais éprouvante.



Et voici mon Défi principal acquitté




mais aussi...
8ème lecture pour le challenge de la Licorne !


3 points
une femme, française : 2 points



vendredi 25 novembre 2016

LUX de Maud Mayeras





Éditions Anne Carrière
247 pages
19 euros


4ème de couv :

C’est l’histoire d’un retour, d’une sentence et d’une vague qui monte à l’horizon. 2016. Antoine Harelde débarque à Ceduna, dans les terres arides du sud de l’Australie. Vingt ans auparavant, il a passé un été dans cette petite ville perdue et, en l’espace de trois mois qui l’ont vu quitter l’adolescence, il a connu la joie, l’amitié, l’amour et l’horreur. Aujourd’hui il est un homme. Il n’a pas oublié, il n’a rien pardonné. Mais la justice prend d’étranges et inquiétantes couleurs à la lumière de l’apocalypse.
Ballade meurtrière sur fond de fin des temps, Lux est le roman de la confirmation d’une jeune auteure au sommet de son art.




L'avis de Dup :

Jusque là Maud Mayeras nous avait proposé du thriller, du pur et dur avec Hématome et Reflex. Aujourd'hui avec Lux elle prend un virage pour nous proposer un roman noir. Du noir de chez noir, mais accrochez vous parce que je vais vous dire quelque chose de presque antinomique : ce roman est lumineux. Il se dégage de cette lecture, de cette histoire sombre et de ses personnages une luminosité extraordinaire qui vous explose en pleine face. Wow, quel bijou ! Jamais roman n'aura aussi bien porté son nom !

Cette lumière est directement issue de la plume de l'auteur qui tout en nous plongeant dans la noirceur de cette histoire arrive à dégager une forme de poésie. Même avec des mots crus l'écriture reste chaleureuse. Qu'est-ce-que je l'ai aimé sa carne puante et jurante (LACHEMOISALEPLUIECONNASSE).

Ce court roman n'est pas un thriller mais n'en est pas moins un page turner. Dès les premières pages on plonge dans une ambiance oppressante, étouffante. Maud Mayeras a bien choisi son continent pour dérouler son histoire : l'Australie et son Outback chauffé à blanc par un soleil implacable, omniprésent, sa poussière rouge et collante. L'ambiance n'est pas stressante, elle est pesante. On y sent comme une menace partout : dans les éléments du paysage tel qu'il est décrit, dans ce patelin du bout du monde Ceduna, non mais franchement qui connait Ceduna ? Pesante aussi dans cette volonté de vengeance du personnage principal Antoine. Et encore plus pesante quand la vengeance est aboutie et qu'on réalise que l'on a lu qu'un petit quart du bouquin...

Je n'ai pas envie de vous en dire plus, le résumé de la 4ème de couv est suffisant. Juste que ce roman est un bijou, oui je me répète, mais c'est pour la bonne cause, je ne voudrais pas que vous passiez à côté. Les mots de l'auteur nous bercent pour mieux nous triturer en dedans. Avec des personnages bien cabossés qu'on ne peut qu'aimer, surtout quand le cabossage vient de l'enfance, comme souvent avec Maud Mayeras. J'ai encore le coeur serré à les évoquer : Antoine, Lark, Cockie, et Hunter...oui,  Hunter qu'on se prend en pleine tronche. Je ne peux que vous conseiller de les rejoindre au plus vite.

Petit roman, petite chronique mais énorme coup de coeur.


Hop un thriller pour le challenge de la Licorne


Un thriller 3 points
< 400 pages 0 point
Une femme auteur 1 point
française 1 point


Et je l'inscris également dans mon Défi des 4 As by Licorne


Option défi 1 validé 

(* DEFI 1 : Lire un livre dont l’auteur a un nom et un prénom qui commence par la même lettre : 6 PT)





jeudi 21 juillet 2016

LE CONDOR de Stig Holmås




Sonatine + Éditions 
255 pages
13 euros


4ème de couv :



William Malcolm Openshaw, poète, intellectuel et amoureux des oiseaux, a eu plusieurs vies. Depuis des années, il erre aux quatre coins du globe, de Mexico à Tanger, en passant par Bogotá et Le Caire, ne fréquentant que les quartiers les plus pauvres. « Je me contente de traverser les villes, de les quitter en marchant lentement. » William est un homme hanté par de mystérieuses tragédies, par des secrets dont il ne parle pas. Au Portugal, à la suite d’une agression, il fait la connaissance de Henry Richardson, attaché à l’ambassade britannique de Lisbonne. Ce dernier semble en savoir beaucoup sur le passé de William, beaucoup trop même. Sur les disparitions, les morts violentes, les ombres et les trahisons qui ont jalonné son parcours. Richardson a peut-être même les réponses aux questions que se pose William sur sa vie d’avant, sur la tragédie qui a brisé son existence. Une véritable partie d’échecs à base de manipulations s’engage alors entre les deux hommes, dont l’issue ne peut être que tragique.



L'avis de l'éditeur :

Stig Holmås, tout en nous proposant une intrigue d’une efficacité absolue, s’interroge sur la condition humaine avec une lucidité déchirante. La beauté et la puissance de l’écriture ne font qu’ajouter à l’éclat de cette perle noire, publiée en 1991, et considérée par beaucoup d’amateurs comme un chef-d’œuvre absolu du genre.

Stig Holmås est né en 1946 à Bergen. Publié précédemment en France dans la «Série noire», en 2001, Le Condor est son premier roman.




L'avis de Dup :


Je ne remercierai jamais assez Pierre Faverolle pour ce commentaire enflammé écrit sur Facebook : « Incroyable, inclassable, extraordinaire... et je n'en suis qu'à la moitié ! ». Voilà, il a suffi de cette phrase pour que je commande illico ce livre, sans même attendre sa chronique. Et vous savez quoi ? Je ne retire aucun des adjectifs alignés, ce livre est vraiment incroyable et inclassable et extraordinaire. Énorme coup de cœur ! 

Je remercie également les Éditions Sonatine d'avoir réédité ce roman et de le mettre à nouveau au devant de la scène, sinon je serai passée à côté de cette perle rare. C'est également pour cela que j'ai rajouté après le pitch le blabla de l'éditeur présent sur la 4ème de couv car il met bien en lumière qui est ce monsieur Holmås.

D'une profonde noirceur, Stig Holmås nous compte la vie de William Openshaw, poète adulé et passionné d'oiseaux, qui enfouit aujourd'hui sa vie en errant de bidonvilles en bas-fonds, dans toutes les grandes capitales du monde. Il côtoie la misère, partage la souffrance et les privations. Il y noie dans l'alcool son passé et ses erreurs. Bon ok, dis comme cela ça n'a rien de tentant n'est-ce-pas ? 

Et pourtant, si vous saviez comme l'écriture de ce roman est belle, profonde, et prenante. Le démarrage est un peu déstabilisant, mais passé les premiers paragraphes, et non les chapitres car il n'y en a pas, on est pris par ce récit. Je ne parlerai pas d'intrigue à proprement parler car il s'agit là du récit d'une vie, tout simplement. 

Mais la construction en est tout bonnement remarquable. À la manière d'un immense puzzle, l'auteur nous fait aborder par petites touches toutes les périodes de la vie de cet homme. C'est un va-et-vient permanent, prenant, captivant, nous laissant sans cesse en attente d'en savoir plus. Un récit incroyablement fort et hypnotique. 

Je pourrais vous faire une liste de tout ce qu'il a fait, de tout ce qu'il a vécu ce William Openshaw, mais je sais que sous ma plume cela sera lassant et risquerait juste de vous éloigner de ce bijou qu'il faut absolument découvrir. Cet homme passionné, passionnant on veut l'aimer. On cherche page après page des raisons de l'aimer malgré... oui malgré toutes les circonstances aggravantes que l'on découvre. Mais il a tellement de circonstances atténuantes mon dieu ! 

On a le cœur de plus en plus compressé dans un étau, mais on survit quand même jusqu'à la fin ou presque. La dernière phrase est le coup de grâce, le dernier tour de vis qui m'a fait exploser le coeur et jeter ce livre loin de moi... Mais je l'ai vite repris et rangé car je sais déjà qu'il fera partie des rares livres que j'aurai plaisir à relire, encore et encore. C'est magistral, vraiment. À lire de toute urgence !

Pour lire la chronique de l'ami Pierre, désormais sortie, c'est ICI.




Deuxième participation au challenge de la Licorne
pour la session 5



lundi 20 avril 2015

GRETEL AND THE DARK de Eliza Granville




Mirobole Éditions
440 pages
22 euros

Le pitch :


Voici la sombre et fascinante histoire de deux mondes parallèles.


Vienne, à la fin du XIXe siècle. Josef Breuer – célèbre psychanalyste – est sur le point d’être confronté au cas le plus énigmatique de sa carrière. Trouvée près d’un asile d'aliénés, maigre, la tête rasée, la jeune fille prétend n’avoir pas de nom, pas de sentiments – d’être, en fait, une machine revenue pour tuer le Monstre. Intrigué, Breuer est déterminé à comprendre les racines de ses maux.

Quelque part en Allemagne, bien des années plus tard. Krysta est une petite fille dont la mère a mis fin à ses jours et qui tyrannise ses gouvernantes et son père, médecin dans un étrange dispensaire... Plongée dans le souvenir des contes de fées que lui racontait sa nounou d’antan, elle lutte pour trouver sa place quand, un matin, on découvre son père mort étranglé dans son lit. Désormais, la petite fille est véritablement seule au monde, sans rien ni personne pour la protéger.




L'avis de Dup :

Voilà un roman bien difficile à lire, mais il est surtout encore plus difficile d'en parler. Le moins que je puisse dire c'est qu'il ne peut pas laisser indifférent. C'est un véritable uppercut qu'assène l'auteur à son lecteur quand arrive la fin du récit. Remarquablement construit avec ses deux histoires qui sont suivies en parallèle et qui subtilement s'emmêlent.


D'un côté, Vienne, fin 19ème, Josef Breuer, un psychanalyste de renom aimerait découvrir ce que cache l'amnésie de la jeune fille qu'il héberge. Elle a été trouvée nue proche d'un hôpital psychiatrique, le crâne rasé, le corps marqué par divers sévices et le bras tatoué de plusieurs chiffres. Elle se dit être une machine dépourvue de sentiments, avec une mission : tuer le monstre.

De l'autre, ailleurs, quarante ans plus tard, nous faisons la connaissance avec une petite fille, Krysta qui est un véritable tyran pour son entourage : son père et les n gouvernantes qui se succèdent pour la garder. Il faut reconnaître qu'elle est odieuse malgré son physique avenant de petite princesse. À sa décharge, sa mère s'est suicidée il y a peu et elle avait été élevée jusque là par une nourrice assez spéciale qui passait son temps à lui raconter des histoires horribles. Sa spécialité était de rendre encore plus horrifique les contes enfantins censés faire frissonner nos chérubins : Hansel et Gretel bien sûr, mais aussi le joueur de flûte de Hamelin, la petite fille aux allumettes, Pierre et le loup, etc. Tous nos contes d'enfants vont défiler dans ce récit, et vont nous dresser à nous adultes, les cheveux sur la tête ! Si le début de la vie de Krysta n'est pas tout rose, ce n'est vraiment rien à côté des épreuves qui l'attendent par la suite...

Ce roman est vraiment déroutant à lire. C'est impossible de trouver des points de repère, ni de lieu, ni de temps. Les personnages sont différents d'une histoire à l'autre et pourtant on les retrouve parfois là où ils ne devraient pas. On finit par baisser les bras sur la compréhension globale et se laisser porter par les deux récits sans chercher plus avant. On navigue en permanence entre fantasme et réalité, on est complètement perdu... et c'est fait exprès ! L'auteur tisse ses fils avec maestria et intelligence. Elle nous soumet à une véritable douche écossaise, avec des passages touchants, émouvants et la page suivante c'est l'horreur totale, la cruauté à l'état pur, le tout asséné avec froideur et détachement. Impressionnant.

Lorsque l'on comprend enfin le lien entre ces deux histoires, à la toute fin seulement, c'est vraiment une énorme claque. Eliza Granville fait avec ce roman une véritable apologie du pouvoir de l'imaginaire. Toutes ces petites histoires qui en créent une grande et qui permettent d'affronter l'Histoire. On ne pouvait pas choisir meilleur titre !!!

C'est un roman sombre et dérangeant. J'ai rarement lu plus noir, et paradoxalement je suis ravie de l'avoir lu. À mon humble avis, Gretel and the dark fait parti des livres qu'il faut lire.