vendredi 23 mars 2012

Interview de Nicolas Sker tome 2

Bon, le tome 1 c'est ICI

Nous on continue sur ce billet là maintenant.

Il est toujours là



enfermé dans notre boite :))

- Déshabillez-vous.
- Quoi ?
- A poil. Et que ça file, des comme toi on en a dix qui pleurnichent dans la file d’attente. Si ça te va pas, tu refiles devant ton clavier, tu ravales tes touches et qu’on te revoie pas pointer le bout de ta plume de moineau anémié.
- Ok, ok. Voilà, comme ça vous êtes contente ?
- Le piercing.
- Comment ça le piercing ?
- Tu l’enlèves.
- Mais j’en ai pas.
- On sait jamais. Bon on va y aller et arrête de te tortiller comme ça, on dirait une danseuse du ventre qui a chopé la gastro.
- Non mais y’a truc qui me pique dans le dos là.
- Phooka, relâche deux secondes le canif, il va être docile celui-là.
- Quoi ? Parce que vous êtes deux ?
- T’entends ça, Phooka il demande si on est deux ? !
- Il est mignon. Ils vont le bouffer comme un sandwich au pâté.
- Bouffer par qui ?
- Tiens regarde là, sous la porte. Tu vois ?
- Le truc rouge là ?
- C’est ce qu’il reste des petits malins qui sont passés avant toi et qui ont cru qu’ils pouvaient raconter n’importe quoi. Ici on dit la vérité, on fout ses tripes sur le billot et on prie pour qu’y en ait pas un à qui ta tronche ne revienne pas. Ensuite t’écoutes ce qu’on dit et tu réponds fissa. Si t’es intéressant et que t’as quelque chose à dire, peut-être qu’on te tuera plus vite que les autres.
- Mais je suis pas venu ici pour ça. Vous m’aviez dit qu’on allait discuter entre gens biens.
- T’entends Phooka, je crois qu’on a un champion là. Allez rentre là-dedans, ça va être à toi.
- Attendez, c’est quoi le truc qui coule là, à côté de la tâche de sang ?
- De la bave. T’en as énervé un ou deux avec ton débat sur la violence dans les thrillers.
- Et ça va durer combien de temps ?
- Juste un mois.
- Quoi ?! Un mois mais on m’avait dit…
BLAM



**********************************************


Phooka :


Merci pour la réponse à Hécléa! Nous sommes 3 à lire le roman ensemble et toutes les 3 , nous avons pensé au débat en lisant ce chapitre! :))
PS: mais c'est Hécléa qui s'est "dévouée" pour poser la question! :))

Toujours plongée (avec délice) dans Le premier Crâne, je me demande comment vous trouvez les noms de vos héros? Ont ils une signification?
Je pense en particulier à Annibale.


Nicolas :

Hubert est un personnage inspiré d’un prof de maths que j’ai eu en prépa. Je n’ai jamais connu son prénom mais il avait une tête à s’appeler Hubert.
Marcus est un prénom qui ne sonne ni trop français (dur d’appeler son héros de thriller René, Jacques…) ni trop américain, qui a du caractère et qui me plaît.
Evannah…J’adore cette sonorité. Je vois tout de suite de longs cheveux bruns et une femme de caractère. (Ma fille s’appelle Eva…)
Annibale. Je ne sais plus mais je trouve que c’est un super nom.
Henri de Ruisseau est directement inspiré d’un collègue de travail.
Désolé pour Annibale mais l’écriture remonte maintenant à 5 ans…et je suis plus sur mes personnages du moment.



Bonjour Nicolas, ravie de vous retrouver chez les copines de Bookenstock :)
Il y a quelques mois de cela j'ai eu le plaisir de lire votre roman et j'avais beaucoup aimé. Le seul point qui m'avait ennuyé, et donc on avait un peu parlé (je ne sais pas si vous vous souvenez ^^) par mail, c'est qu'il manquait une profondeur aux personnages. Ma question est donc de savoir si c'est un point que vous allez particulièrement travailler pour votre prochain roman ? Et de quelle manière créez vous vos personnages ?
Je vous souhaites un bon moment sur BES !!


Nicolas :

Bonjour Mallou,

Je me souviens très bien de ce manque de densité et de chair que vous aviez pointé dans les personnages et je le reconnaissais volontiers.
Donc autant vous dire que s’il y a un point qui sera amélioré dans le prochain roman, c’est bien celui-là.
J’y ai mis beaucoup d’énergie et de soins. D’autant qu’un enfant fera aussi partie des personnages principaux aux côtés des deux « héros » et il faut que tout cela sonne juste.
Le tout est de trouver le bon dosage. Je m’explique. Le prochain roman restera un thriller avec ce que cela impose d’urgence, d’enquête, de tension et de retournements de situation…
Les personnages doivent donc exister de façon crédible, originale et très attachante sans plomber cette intensité narrative.

Je veux largement améliorer mes personnages mais je ne veux pas perdre ce qui, je pense, fait aussi l’intérêt de ma façon de raconter une histoire : le rythme.
Tout est question de dosage et en grande cuisinière que vous êtes (même si vous ne l’êtes pas, faites semblant, ça m’aidera pour ma métaphore), vous savez à quel point la saveur enivrante d’un plat, dépend de l’art avec lequel vous aurez dosé chacun des ingrédients.

A bientôt Mallou.

P. S : A propos de plats, c’est pas l’heure du goûter d’ailleurs ?


Un cockie ? Des spéculos ? Café ou thé ? :))

Phooka :


Bon moi j'ai une question qui me titille :)
Vous sachant plongé dans le monde de la télé où tout se passe très vite, où tout se sait très vite (je pense aux audimat par exemple), où les réactions sont immédiate. Je ne peux pas m'empêcher de me dire qu'en tant qu'auteur l'échelle de temps et de réaction est totalement inversée non?
Lorsque le roman sort, il faut attendre avant d'avoir les premiers avis des lecteurs et attendre encore plus pour savoir les chiffres de vente etc etc...
Est ce qu'il vous a fallu apprendre à attendre" , être patient quoi. Comment avez vous vécu ça?


Nicolas :


La patience. Le mot que je déteste le plus. Et je n’avais pas besoin de la télé pour accentuer ce trait de personnalité.

Mais pour répondre précisément à votre question, oui la télé donne des résultats rapides mais il y a une contrepartie à cela : on bosse 3, 4,5, 6 mois sur une émission et en 2 heures, c’est terminé, elle est passée, on ne la reverra plus. En ce moment même, mes équipes et moi donnons les dernières touches d’un grand prime pour les 25 ans de M6 qui sera diffusé mercredi soir prochain (25 ans d’événements que les français n’oublieront jamais). Cela a demandé un travail de recherches, d’écriture et de montage considérable (et l’émission va vraiment être forte en émotions). Mais on est dessus depuis plus de 3 mois et nous allons terminer probablement la veille de la diffusion. On n’aura même pas le temps de savourer le travail terminé que l’émission aura été diffusée, que les audiences seront tombées et qu’on passera à autre chose.

Pour un livre, la durée de vie est tellement plus longue, pour ne pas dire infinie. On se dit qu’il nous prend parfois des années de notre vie mais à chaque nouveau lecteur, c’est une nouvelle satisfaction. Et puis une histoire comme je le disais dans le cadre d’une autre réponse, elle vit pour l’éternité.

Cela dit, vous avez pleinement raison, l’écriture demande beaucoup plus de patience et de confiance sur le long terme. Je n’ai pas encore écrit une ligne du prochain (le synopsis est terminé, le profil des personnages aussi, le découpage chapitré accompli) et je suis déjà impatient de le faire lire. Alors qu’il me reste probablement au minimum un an de boulot sans jamais avoir la certitude totale d’être édité.

Pour conclure, je dirais que l’écriture d’un livre demande de la patience pour aller jusqu’au bout et de l’impatience pour aller jusqu’au bout…aussi.

Et l’histoire de vous faire partager en live la préparation d’une émission, je pars à l’instant en plateau pour assister à l’enregistrement de l’émission !
 ( note de Dup, la réponse est arrivée un peu avant midi ce 08/03 )


Phooka :


Merci beaucoup pour votre réponse! C'est vraiment étonnant de vous imaginer écrire le mail, et en même temps être en train de préparer cette émission! On vous y verra?



Nicolas :


Non vous ne m’y verrez pas (peut-être au générique de fin qui va très vite) mais vous m’y entendrez. C’est moi qui fait les voix de tous les sujets.



Hécléa :

Merci pour votre réponse, je vous rassure votre peau ne risquait finalement rien, c'était surtout pour le clin d'oeil ;)

Toujours dans la lecture du Premier crâne, j'ai une autre question...
Le rythme est ultra rapide et l'on sent clairement que c'est un parti pris de votre part, au risque de passer certaines choses sous silence ou d'avoir certaines parties un peu rapides voire faciles, vous êtes vous forcés à raccourcir certains passages, à évincer des choses, à devoir faire des choix pour garder cette frénésie ? 

Nicolas :

Bonjour Heclea (ça vient d’où ce pseudo ?),

J’ai toujours voulu un livre au rythme haletant mais...au départ, il était deux fois plus épais. On posait plus les personnages, leur histoire, et je peux vous faire une révélation, il y avait toute un retournement de situation autour d’Henri de Ruisseau (qui était notamment un traître comme je les adore. A savoir père de famille top, collègue de bureau dévoué et en réalité complètement fanatique). Le personnage était plus travaillé et plus important. Mais bon, il a fallu couper. Pourquoi ? Parce que ces passages n’étaient peut-être pas si bons ? Parce que mon éditeur voulait quelque chose de plus immédiat. Parce qu’il fallait recentrer sur l’intrigue principale. Parce que je n’étais pas connu du tout et qu’il ne fallait pas faire peur au lecteur avec un livre trop épais.

Pour le prochain, je suis certain d’une chose : le rythme sera là mais pas au détriment de la densité des personnages, de l’ambiance…bref de l’impression que tout cela existe vraiment.

Je suis désormais un peu plus sûr de moi dans les choix de coupes (ou de rajouts) qu’il faudra faire au final. En tout cas je l’espère.

Phooka :


Ayant fini Le premier crâne, j'ai été impressionnée par la quantité de "travail préliminaire" qu'il a clairement été nécessaire de faire avant l'écriture de ce roman. Je pense en particulier à la lecture de tous les ouvrages de références cités à la fin du roman.
Et je me souviens que dans une de vos réponses vous disiez que ça faisait déjà un an que vous travailliez sur votre prochain roman sans même avoir commencé à en écrire une ligne.
Pourquoi autant de préparatifs?
Êtes vous un perfectionniste de nature?
ou alors aimez-vous tout simplement découvrir de nouvelles choses?




Nicolas :

Bonjour Phooka,

Je vais vous faire une réponse de jeux vidéo en 2 niveaux.

Le premier : j’adore apprendre, comprendre et faire comprendre, et je ne dors pas tant que je n’ai pas parfaitement compris un sujet. Si je ne suis pas capable de raconter simplement une idée à quelqu’un, je la creuse encore et encore, je la pétrie, je la teste, jusqu’à ce qu’elle me soit évidente et donc évidente pour celui qui l’écoute. C’est le moins que l’on puisse faire pour le lecteur.

Le second niveau : vous tous qui fréquentez cet excellent blog avez au moins un point commun. Chaque jour, vous mettez en pratique le concept de suspension consentie de l'incrédulité. Cette étrange opération mentale qu’effectue un lecteur (ou un spectateur) d’une œuvre de fiction, qui accepte, le temps de sa consultation de l’œuvre, de mettre de côté son scepticisme. (Wikipédia). En clair, on fait semblant de croire que toute cette histoire est vraie alors que l’on sait que c’est faux. Sauf que pour que le lecteur pense que c’est vrai, il faut habiller notre histoire avec les vêtements de la plausibilité (et je n’ai pas dit la réalité). Et pour bien l’habiller, il faut qu’en premier lieu l’auteur croit lui-même que tout ce qu’il écrit est « vrai ». Comme il part de nulle part, il a besoin d’aide. Cette aide, il la puise toujours dans une réalité personnelle, même éloignée du sujet de son livre. Je pense que l’imagination pure n’existe pas. En tout cas pas sur la totalité d’un livre. Donc trouver des faits historiques vérifiées, des données scientifiques prouvées qui vont dans le sens de notre intuition narrative première, ça aide à y croire soi-même. Voilà pourquoi je creuse tant : j’ai besoin de savoir que je raconte quelque chose qui peut avoir une résonnance réelle dans la vraie vie des lecteurs. Qu’à la fin, ils se disent, tout cela est troublant, intéressant. C’est très excitant pour un auteur de diriger ses personnages et le lecteur vers des révélations historiques rares, des approches scientifiques inédites.

Voilà, quand j’écris la première ligne, je sais que je vais vous emmener vers quelque chose de solide et c’est cela qui me sert de moteur.




PS : Le concept de suspension consentie de l’incrédulité a été pensée par un auteur poétique du XIXème siècle. Samuel Taylor Coleridge, écrivain, critique et poète britannique qui sans sa Biographia Literaria, datée de 1817 écrit « [...] il fut convenu que je concentrerais mes efforts sur des personnages surnaturels, ou au moins romantiques, afin de faire naître en chacun de nous un intérêt humain et un semblant de vérité suffisants pour accorder, pour un moment, à ces fruits de l'imagination cette suspension consentie de l'incrédulité, qui constitue la foi poétique. »


Nahe :

Bonjour,

Après avoir lu "Le premier crâne", j'ai été frappée par la facilité avec laquelle vos héros basculent du côté des "méchants", n'hésitant pas à tuer. Pourquoi ce choix ?

Nicolas :


Bonjour Nahe. J’imagine que vous faites notamment allusion à la scène où Marcus tue Irina presque de sang-froid.

C’est une question intéressante. Et j’ai mis du temps avant de savoir comment Marcus réagirait.

Au final, je ne pense pas qu’il bascule facilement dans la violence et d’ailleurs il hésite à tuer. Mais mettez-vous à sa place. Cette femme a tout fait pour le tuer, il est seul face à elle et il sait qu’elle fera encore tout pour le tuer à la moindre erreur de sa part. Il sait aussi qu’il prend un risque énorme en essayant seulement de l’attacher, de l’assommer…Cette femme est le Mal et c’est à lui que revient la responsabilité de l’éliminer ou de le laisser prospérer à ses risques et périls. Il fait ce choix définitif dicté par une espèce de nécessité où la morale propre à certains récits s’efface pour laisser place au cruel pragmatisme de la réalité. Mais Marcus le vit mal. Dans la première version du livre, cet acte avait d’ailleurs des conséquences psychologiques bien plus perturbantes sur lui…

La question que je me pose est : qu’aurais-je fait dans la même situation, où ma vie et celle de ceux que j’aime est en jeu.

5 commentaires:

Phooka a dit…

Bon moi j'ai une question qui me titille :)
Vous sachant plongé dans le monde de la télé où tout se passe très vite, où tout se sait très vite (je pense aux audimat par exemple), où les réactions sont immédiate. Je ne peux pas m'empêcher de me dire qu'en tant qu'auteur l'échelle de temps et de réaction est totalement inversée non?
Lorsque le roman sort, il faut attendre avant d'avoir les premiers avis des lecteurs et attendre encore plus pour savoir les chiffres de vente etc etc...
Est ce qu'il vous a fallu apprendre à attendre" , être patient quoi. Comment avez vous vécu ça?

Phooka a dit…

Merci beaucoup pour votre réponse! C'est vraiment étonnant de vous imaginer écrire le mail, et en même temps être en train de préparer cette émission! On vous y verra?

heclea a dit…

Merci pour votre réponse, je vous rassure votre peau ne risquait finalement rien, c'était surtout pour le clin d'oeil ;)

Toujours dans la lecture du Premier crâne, j'ai une autre question...
Le rythme est ultra rapide et l'on sent clairement que c'est un parti pris de votre part, au risque de passer certaines choses sous silence ou d'avoir certaines parties un peu rapides voire faciles, vous êtes vous forcés à raccourcir certains passages, à évincer des choses, à devoir faire des choix pour garder cette frénésie ?

Phooka a dit…

Ayant fini Le premier crâne, j'ai été impressionnée par la quantité de "travail préliminaire" qu'il a clairement été nécessaire de faire avant l'écriture de ce roman. Je pense en particulier à la lecture de tous les ouvrages de références cités à la fin du roman.
Et je me souviens que dans une de vos réponses vous disiez que ça faisait déjà un an que vous travailliez sur votre prochain roman sans même avoir commencé à en écrire une ligne.
Pourquoi autant de préparatifs?
Êtes vous un perfectionniste de nature?
ou alors aimez-vous tout simplement découvrir de nouvelles choses?

Nahe a dit…

Bonjour,

après avoir lu "Le premier crâne", j'ai été frappée par la facilité avec laquelle vos héros basculent du côté des "méchants", n'hésitant pas à tuer. Pourquoi ce choix ?