mardi 10 mai 2022

Cinquième volet de l'ITV de DAVID BRY

 


Tome 5 de l'interview de David Bry

Retrouvez les tomes précédents: ITV1ITV2ITV3, ITV4





On lui laisse la parole.

 

Bonjour et bienvenue dans ce 'Mois de", celui qu'on va faire ensemble :)


Déjà, un grand merci à Dup et Phooka qui m'ont fait le plaisir et la gentillesse de m'inviter. Je suis ravi ! Échanger sur la lecture, l'écriture, l'imaginaire, les histoires, je trouve ça passionnant. Et ce n'est pas tous les jours qu'on en a l'occasion. Nous autres, auteurs, avons des métiers assez solitaires en dehors des festivals et de ces moments-là.


Bref !


On y va.
Vous êtes prêts ?
Moi, non :D. Mais ça va, j'aime les surprises. Et l'impro.


Je suis donc David Bry, 48 ans au moment où j'écris ces quelques lignes, seul, dans mon bureau, l'air (évidemment :) ) inspiré.
J’invente des histoires depuis que je suis tout petit : première nouvelle à 9 ans, premier roman à 12 ans. On pourrait croire au génie, genre le Mozart de l'imaginaire. Ben non, pas du tout. J'ai galéré, longtemps, j'ai écrit des textes pas forcément excellents, mais il fallait que j'en passe par là pour essayer de faire mieux, techniquement parlant entre autres. Je crois que c'est en partie ça qui me pousse, d'ailleurs : essayer de faire mieux à chaque fois. À mon sens, écrire est un chemin. Chaque roman est une pierre, une étape, un endroit où on se pose pour mieux repartir. Je trouve ça fascinant, même si reprendre la route ça veut dire aussi abandonner une histoire qu'on a terminée, ce qui noue à chaque fois les tripes. Vraiment.


Si je lis de tout (ou presque), je n'écris que de l'imaginaire. C'est le genre qui me va le mieux. Faire appel aux monstres, à la magie, au merveilleux, c'est comme ça que je sais raconter et, j'espère, toucher les lecteurs. Il y a dans l'imaginaire quelque chose de très intime, que je trouve d'une grande beauté. On touche aux peurs, aux espoirs, à l'enfance, aux mythes fondateurs. Tout cela est très enfoui en nous, et pour autant nous anime. Enfin, c'est ce que je crois :).


Pour ceux qui m'ont déjà lu, vous savez déjà sans doute que j'aime les histoires tristes. Genre, très tristes. Je suis fasciné par le tragique, par le destin, par les sacrifices et la perte (mais moi, je vous assure, je vais très bien ;) ). Il y a quelque chose que je trouve profondément humain dans tout ça. Que passe l'hiver, 2087 ou Le Chant des géants sont dans cette veine, ce tragique. La Princesse au visage de nuit s'y apparente, même s'il y a plus de lumière dans ce roman que dans les autres. Le Garçon et la ville qui ne souriait plus est une exception. Je venais d'être papa, je ne voulais pas ni ne pouvais pas écrire d'histoire triste à ce moment-là. Que mes lecteurs me pardonnent ! :D
Pour autant, j'aime beaucoup rire aussi (puisque je vous le dis, que je vais bien ! :) ). Les Contes désenchantés forment un petit recueil à l'humour souvent noir que j'ai adoré écrire, et je ne désespère pas de continuer parfois dans cette veine.
Enfin, j'écris aussi de la jeunesse depuis peu, grâce aux éditions Nathan. Les Héritiers de Brisaine est une série que j'adore : quand je l'écris, j'ai l'impression d'avoir 10 ans et de vivre mille aventures avec mes meilleurs amis et une épée en bois.


Voilà. Après ces quelques mots fort académiques, je vous propose un jeu, d'accord ? J'adore jouer :). Et puis je n'aime pas trop parler tout seul ;). On va donc jouer au portrait chinois, sur toute la semaine. Vous me posez une question (Si tu étais...) dans les commentaires, et je réponds. Et j'ai le droit moi aussi de vous en poser une.
D'accord ?
Allez.
Zou.
C'est parti.
:)

**********************************************************


Alex Ferder :

Coucou David,

merci pour toutes tes réponses.

Je suis sciée de rencontrer quelqu'un qui aime les corrections, mais je comprends ton point de vue. Le poids des mots justes est en effet très important et déterminant. Surtout en fantasy pure, je trouve. Le monde est totalement construit, il faut pouvoir transmettre au lecteur une idée exacte de ce que l'auteur a dans sa tête.

Je me suis complètement plantée pour l'époque que tu as choisie. Ta réponse est pleine d'espoir, assez surprenant pour un auteur qui n'écrit (presque) que des histoires tristes (mais qui va bien :)) . Donc j'avais parié avec moi-même (ne cherche pas comprendre) que tu aimerais vivre au moyen-âge. Dans Le chant des géants, tu sembles être si à l'aise avec les châteaux, les chevaliers tout ça que je pensais que tu choisirais cette époque.

En ce qui me concerne, je choisirais la deuxième guerre mondiale en Normandie pour voir débarquer les américains. Je suis à peu près sûre d'y avoir été avec une robe à fleurs et les cheveux au vent- j'ai les larmes aux yeux à chaque fois que je vois les images (bon j'ai les larmes aux yeux pour beaucoup de choses - mais moi aussi je me porte bien :)). Malgré la guerre, je vois cette époque comme un renaissance du monde, un moment où tout était possible et encore innocent.

J'ai encore droit à une question ? ( EEEEEEEEEEEEEEEEEEEEEEEEmmmmaaaaaaaaaaaaaaaaa j'ai encore droit à une question ?). Bah comme on dit, mieux vaut demander pardon que permission. Quel est le genre que tu n'écriras jamais ? Quel est le genre que tu voudrais écrire mais que tu hésites à écrire ? Et (merdouille ça fait trois questions) penses-tu qu'un auteur doit toujours rester dans le même genre littéraire ou bien qu'il peut changer ?

David :

Salut Alex !
Je viens d'apprendre que tu es la prochaine à passer,
(chuuut... fais semblant de ne rien lire de bizarre)
ah, écoute, quelle bonne nouvelle !
(barre-toi ! vite !)
Tu vas voir, c'est fantastique !
(tu parles !)
Un vrai moment d'échange et de réflexions !
(elles m'avaient promis du chocolat et là je suis coincé dans la cave, à répondre à des tonnes de questions)
Franchement, il ne faudrait pas rater cela pour...
AAAAaaaaAAh ! Phooka ! Dup ! Vous êtes là !
Quel bonheur !
Oui, oui, je répondais à Alex, bien sûr...


Donc...
:D


J'adore le moyen-âge, oui, je suis fasciné par les châteaux, les chevaliers, l'esprit de la quête, de l'épique. Mais quand même, je préfère... demain :). Et oui, je comprends ce que tu ressens concernant le débarquement.


Le genre que je n'écrirai jamais ? J'aurais pu dire l'horreur, parce que je suis un gros froussard et imaginer des histoires qui font peur pourrait facilement m'amener à m'enfermer dans un placard avec ma ptite famille, mais je ne sais pas... peut-être... On ne sait jamais. Du coup je vais dire la romance. C'est trop codifié pour moi, trop prévisible (à mon sens), trop... trop loin de moi :). Je crois que si je devais en faire, l'héroïne finirait alcoolique et le héros se marierait avec la mère.


Le genre que j'hésite à écrire, ce sera l'horreur du coup. J'ai toujours dit que je n'en ferai jamais, mais j'avoue que des fois, ça me titille. On verra ! Par contre, et ça j'y ai déjà réfléchi, je ne me vois pas sortir de l'imaginaire. J'aime trop ça. Je trouve que c'est une littérature très puissante, extrêmement viscérale, évocatrice. Elle est passionnante à travailler.


Moi j'adore les questions donc c'est cool :).
Et ta dernière est très intéressante aussi, merci.
Pour moi, la seule limite de l'auteur, c'est son imagination. Ce qu'il a envie, besoin de raconter. Nous enfermer dans des cases, jamais ! A nous d'occuper celles qui nous parlent. Il faut le faire avec sérieux, bien sûr, mais pourquoi rester toujours sur le même chemin, si on a envie d'en essayer un autre ? Les lecteurs nous diront s'ils aiment plus, moins, différemment. Le genre, vraiment, n'a pas d'importance. La seule chose qui en a, c'est l'honnêteté de l'auteur vis-à-vis de ses lecteurs. Donner le meilleur de nous-mêmes. Donner ce qu'on sait le mieux faire. Le reste n'est que... littérature ;).


A bientôt Alex !
(je t'aurai prévenue :P)


Regina Falange :

Oh un scoop! Ça serait génial ça. Je vais attendre des nouvelles alors.
Pour ma part je lis autant de Bd, mangas, comics que je lis de romans, j'aime passer d'un format à l'autre, que ce soit en jeunesse comme en adulte. Le budget livre se retrouve multiplié en 4 mais le plaisir de la lecture aussi.

Aller une dernière question pour terminer la journée, es-tu auteur à plein temps ou as-tu un autre métier ? Si Oui lequel ? Et si non, arrives-tu a bien vivre de ta plume et qu'est-ce qui t'a décidé à ne faire qu'écrire à plein temps ?

David :

Je t'envie, Regina, sur tous ces formats de lecture ! C'est vraiment quelque chose vers lequel je veux tendre.

Pour l'instant, je travaille dans l'informatique en plus d'écrire. Cela fait 15 ans que je jongle avec les deux (plus la vie de famille). C'est parfois difficile, souvent (très) fatiguant. Je vais sans doute basculer dans pas trop longtemps, pour ne faire qu'écrire. J'ai la chance d'avoir pas mal de propositions de projets, toutes extras, vraiment. Concilier tout ce travail *en plus* d'un autre plus alimentaire va devenir très, très, très compliqué. Donc, prochainement, je devrais faire le grand saut. Ma situation sera plus précaire, la vie d'auteur est souvent compliquée, mais... c'est un rêve pour moi, depuis gamin. Et toutes ces histoires que j'ai envie d'écrire... Bref, je pense que ça peut le faire. Donc je vais essayer :).



Fantasy à la carte :

Bonjour David,

Et non je ne relis jamais les livres que j'ai lu parce que je n'ai toujours pas le temps. Par contre, je garde tous mes livres (en tout cas pour le moment) même ceux que j'ai moins aimé. Les livres, c'est trop précieux et qui sait, un jour si j'aurais pas une envie de me replonger dans certaines histoires.

Les livres que tu lis pour ton plaisir, tu les achètes ou tu les empruntes en bibliothèque ?

David :

J'ai la chance de recevoir pas mal de livres directement à la maison (quel bonheur !), je m'en achète aussi (quel bonheur également !). Je ne vais quasiment jamais en bibliothèque. C'est idiot, mais je n'ai pas ce réflexe-là, et puis j'ai une très grande bibliothèque à la maison (sans parler de celle que j'ai laissée chez mes parents !), et j'adore vivre avec tous ces livres. Comme toi, je ne relis pas, mais je me dis qu'un jour, peut-être... alors non, je les garde ! :).


Danilomzb :

Hello David,
Merci pour ta réponse, alors Tornade (enfin un fan des Xmen !!) choix intéressant. Pour ma part je me verrais bien en Mystique parce qu’elle est du côté des vilains, qu’elle est métamorphe et surtout très bleue, mais en vrai je préfèrerais être une magicienne :-)

Alors en passionnée de lectures imaginaires, je m’interroge toujours sur les sources des écrivains, oui où allez-vous chercher des idées pareilles tous ces mondes imaginaires ? Tu vois j’imagine toujours l’auteur qui se réveille en se disant : mais oui c’est ça l’idée ou qui s’inspire du quotidien … et toi comment ça te vient ?

Allez encore une petite pour la route : si tu étais l’invité du mois de juillet des deux vénérables de Book en Stock qui serais-tu ? (Pitié ne parle pas d’Alex on ne va pas pouvoir la calmer :-))
Danielle

David :

Salut Danilomzb,


Mystique ? Du coup, tiens, question (oui, je commence par la question, cette fois :D) : tu préfères les méchants ou les gentils dans les histoires ?


Mes idées me viennent de plein de sources différentes, principalement de mon quotidien, de figures mythologiques ou de chansons.
L'idée du Garçon et la ville qui ne souriait plus, par exemple, m'est venue lors d'une soirée à la campagne, au bord d'un canal. Il y avait plein, plein de gens différents. Je me suis dit, une fois de plus, la chance que j'ai de vivre dans un milieu très, très hétérogène ; et je me suis demandé à quoi ressemblerait un monde qui ne tolèrerait pas la différence. La première pierre du Garçon était posée.
Pour Que passe l'hiver, les sources sont plus diffuses. Il y a du Cernunnos, bien sûr, des Parques et des Nornes, de la tragédie grecque. Tout est cependant parti du fait que je voulais écrire une histoire triste et poétique. Le reste est venu presque tout seul, à partir des figures que je viens de mentionner.
La Princesse est, comme le Garçon, assez inspirée de mon quotidien. Plusieurs de mes proches travaillent avec les enfants maltraités et, étant moi-même papa (poule), c'est un sujet sur lequel je suis extrêmement sensible. Je sais d'ailleurs que j'écrirai d'autres romans autour de la parentalité, de la transmission, de l'amour, de la perte. C'est quelque chose qui me travaille, de manière assez logique sans doute, d'ailleurs.
Le Chant des géants, quant à lui, était à la base une commande. Oh, comme j'ai galéré avant de trouver le bout par lequel j'allais prendre ce roman ! Je tournais, cherchais, réfléchissais, mais rien, absolument rien ne sortait. Et puis un jour j'ai repensé à la Chaussée des Géants, en Irlande. Le premier petit caillou était posé, et m'a conduit jusqu'au monde que j'ai créé pour cette histoire.
J'ai parlé des chansons. Je l'ai dit au fil de mes réponses précédentes, j'écris toujours en musique. Elle m'influence énormément, principalement sur les sentiments, les ambiances. Avec quelques notes, vraiment, j'ai l'esprit qui part, et les idées viennent... toutes seules, ou presque. Un mot attrapé par-ci, un sentiment par-là. Par exemple, j'ai écrit Que passe l'hiver avec beaucoup de chansons du groupe Shearwater. Une des chansons s'appelle "Run the banner down". Je l'ai traduite dans ma ptite tête (à tort ou à raison) par "Cours, ta bannière abaissée" ; cela m'a conduit sur une idée d'abandon, d'acceptation de cet abandon, et ce sentiment, cette impression m'a (entre autres) beaucoup influencé dans l'écriture de Que passe l'hiver. Pour Le Chant des géants, j'ai beaucoup écrit en écoutant "La rose et l'armure" d'Antoine Elie, pour la poésie qui en émane, et des chansons comme Daudalogn (Sigur Ros) ou Kettering (The Antlers) ont accompagné les scènes les plus tragiques du roman. Dans La Princesse au visage de nuit, les paroles de "So far" d'Olafur Arnalds collent, de manière assez extraordinaire, à l'histoire (sans parler de l'ambiance de la chanson). Ce qui est fou, c'est que j'ai découvert cette chanson lors de mes corrections seulement ! Mais je l'ai longtemps, très longtemps écoutée en boucle tout en retravaillant. Voilà. Tu vois, je pense, à la vue de la longueur de ma réponse sur la musique, à quel point elle m'accompagne.


Ah, super question pour l'invité ! Si j'étais celui de juillet, je serais... Michael Roch, que j'aime énormément ("Moi, Peter Pan" est un bijou), ou bien Aurélie Wellenstein, dont la diversité des univers me fascine.



Alex Ferder :

Salut David,

Waouw trop cool toutes tes réponses
*alex sur la pointe des pieds faisant ses valises un ticket pour l'Alaska à la main*
C'est vraiment sympa ce principe d'interviews tous les jours
*alex qui résilie son forfait mobile et internet, démissionne, vend son vélo de maison*
Et les mémés ont l'air vrm sympas
*alex qui transfère tous ses comptes bancaires (nombreux et fournis) aux îles Caïman*

Un peu de sérieux, non mais oh

Je suis super déçue que tu n'écrives jamais de romance, j'espère que la semaine prochaine c'est la semaine des défis à la con, du genre "écrivez une romance intense entre un gnome et une banshee", vous avez deux heures. On pourrait faire ça, hein, Emma ? Mais juste ce mois :) (Emma elle me refuse jamais rien, tremble David, tremble !)

Bon j'avance sur le chant des géants, et j'ai remarqué des petits dessins qui entrecoupent le texte. C'est toi qui les as dessinés ? Qui les as choisis ? Qu'est-ce que cela apporte selon toi au texte ?

Autre chose (pardon, je suis très curieuse et pour une fois que je tiens un auteur, j'en profite), tu écris au présent dans le chant des géants. Mais what * ? Pardon pour cet anglicisme, mais le code de la fantasy c'est pas le passé, tu sais genre les verbes comme conquérir que tu dois conjuguer au passé simple ? que nous conquérissâmes, que nous conquérisiamions, que nous eusses conquéru (punaise je déteste conjuguer). Tout ça pour dire, serais-tu un briseur de codes ? C'est qu'il me semble bien puisque tu as dit que tu ne voulais pas écrire une romance parce qu'il y a trop de codes.

Petite question du soir : si tu étais un moyen de transport, lequel serais-tu donc ?

Alex

* mais comment ?

David :

Chère Alex,
(RDV aux îles Caïman, j'ai échangé l'âme de 12 lecteurs contre un bungalow sur la plage)


La romance non traditionnelle, ça me va, moi ! La banshee, elle peut crier son amour au gnome et le tuer comme ça, à la fin ? Tu vois, ça m'inspire, ça !! :)


Ce n'est pas moi qui ai dessiné les séparateurs de paragraphe (je suis archinul en dessin), mais c'est bien moi qui les ai mis en place, oui. Le Chant des géants est une histoire de vie et d'amour, de batailles et de mort. C'est pour ça que j'ai mis ces différents séparateurs dans mon manuscrit : l'arbre, l'épée et le crâne. De manière générale, ce sont les arbres qui séparent les paragraphes du roman. De temps en temps, lors des batailles, arrivent les épées. Puis les crânes. Lors du maquettage, le directeur artistique de HSN a créé les graphismes que tu as dans le roman à partir de mes modèles-tout-pourris-récupérés-d'Internet, et en a fait ces dessins archi beaux.
Je mets tout le temps, dans chaque manuscrit, des séparateurs de paragraphe spécifiques. Je le fais depuis 2087, donc depuis un peu plus 10 ans. Je le fais avant tout pour moi, j'aime l'effet que cela produit, et puis cela ajoute de l'ambiance, je trouve. C'est un détail, bien sûr. Mais j'aime les détails :).


Ah, le présent... Comme j'aurais aimé vouloir briser les codes, révolutionner la fantasy, imposer un nouveau style et un nouveau courant littéraire ! Mais non. Si j'écris au présent, c'est juste que, quand j'écris au passé, c'est chiant à lire. Vraiment.
C'est en écrivant Que passe l'hiver que c'est venu. J'écrivais et réécrivais le 1er chapitre, et c'était ampoulé, long, presque précieux. Je n'y arrivais pas. Alors, un peu comme ça, j'ai testé le présent, et le résultat a été très différent. J'avais beaucoup plus de rythme, beaucoup moins de niaiseries, je ne tournais plus autour du pot. C'était tellement mieux ! Alors, depuis, je n'écris qu'au présent, pour essayer d'écrire le mieux possible. C'est un temps très décrié en littérature, oui. A vrai dire, je m'en fiche. Complètement. J'écris du mieux que je peux, à ma manière. Si ce que je fais est mieux au présent, ça sera au présent. Tu me parlais des genres, hier, et je te répondais la liberté de l'auteur. Sur le temps, c'est exactement la même chose : il faut être libre parce que la création doit être un espace de liberté.


Ah, trop facile la question : la marche ! J'adore marcher. J'en profite pour regarder, m'arrêter parfois, changer de chemin aussi, quand c'est plus beau ailleurs. Je privilégie toujours la marche au métro par exemple, quand je suis en ville.
Chez moi (à la campagne), je marche aussi, presque tous les jours, 1 heure. En musique. Cela m'aide à poser mes idées, en faire venir de nouvelles. C'est quelque chose dont je n'ai pas encore parlé dans ce "Mois de", tiens, mais la marche, vraiment, est très importante dans mon processus de création. J'ai besoin d'avoir le corps en mouvement, j'ai du mal à réfléchir assis. En marchant (toujours sur le même chemin, j'ai un côté monomaniaque :D), j'ai l'esprit qui se libère et, avec de la musique dans les oreilles, les idées se forment, se construisent, s'associent. J'ai toujours mon carnet avec moi quand je marche (j'en ai un autre sur ma table de nuit). Il se remplit vite.


A moi.
T'es prête ?
Hop.
Pourquoi tu écris, dis ?


Regina Falange :

Bonjour David.
Cette interview est passionnante merci. Aucune question aujourd'hui (pour l'instant), mais juste pour te dire qu'après avoir refermé Que passe l'hiver j'étais incapable de sortir un autre roman de ma pal (et pourtant j'ai le choix !...) du coup hier je suis allée acheter La princesse au visage de nuit et j'ai hâte de découvrir cette nouvelle histoire. D'ailleurs je vois qu'il a gagné le prix des étoiles montantes de l'imaginaire. Quel effet ça fait d'avoir été d'une part sélectionné et puis récompensé par un prix? (ah ben si finalement une mini question oups)

David :

Bonjour Regina !
(au contraire, merci pour les questions :)


Je suis ravi que tu aies aimé Que passe l'hiver et qu'il soit resté un peu :). Je crois que c'est cela, aussi, qu'on cherche en écrivant : marquer nos lecteurs, leur laisser un petit quelque chose lorsqu'ils ont tourné la dernière page de l'histoire. Comme cela nous arrive évidemment à nous aussi, auteurs (qui sommes aussi lecteurs), lorsqu'on lit d'autres livres.


Les étoiles montantes de l'imaginaire sont un nouveau label chez Pocket, et effectivement La Princesse au visage de nuit a été le premier roman publié sous ce label. Quant au prix, il s'agit du Prix Imaginales des Lycéens, que le roman vient de recevoir.
Tu l'imagines, je suis hyper content :).
J'ai été très, très heureux (et très fier) d'ouvrir Les étoiles montantes de l'imaginaire avec La Princesse. Ce nouveau label Pocket a pour objectif de proposer aux libraires qui s'y connaîtraient moins en imaginaire, des textes faciles d'accès, qui ne nécessitent pas d'avoir les codes de la SF, de la fantasy ou du fantastique pour les apprécier. Ils peuvent ainsi, les yeux fermés (attention aux monstres et aux portes), les proposer à leurs lecteurs en toute confiance. Au-delà de l'idée que je trouve géniale (promouvoir les littératures de l'imaginaire), moi qui suis très dans le collectif, je suis très heureux de faire partie de cette équipe d'auteurs (majoritairement francophones). On y retrouvera entre autres Aurélie Wellenstein, Romain Benassaya, mais aussi des plumes comme celle de Gilberto Villarroel.
Quant au Prix Imaginales des Lycéens, il s'agit du tout premier prix obtenu par l'un de mes romans. C'est vraiment chouette. C'est chouette parce que c'est un prix, parce que c'est un prix des lecteurs. Et parce que ça fait du bien, énormément. Le métier d'auteur est fantastique, vraiment, mais pas toujours évident. Au-delà des difficultés matérielles, il y a quelque chose qui nous bouffe souvent, c'est ce fameux syndrome de l'imposteur. On est beaucoup à l'avoir, et je ne suis pas le dernier :). Je différencie ce syndrome du stress. Le stress a des vertus positive, il nous pousse (me pousse, en tout cas), à toujours faire du mieux possible, à peaufiner, peaufiner, peaufiner . Le syndrome de l'imposteur peut nous donner envie d'arrêter, d'abandonner, lorsqu'on craint de ne pas être à sa place. C'est quelque chose d'assez naturel, je crois, qu'on connaît tous plus ou moins. Et il faut lutter contre ! Pour revenir aux prix, ils permettent de soigner un peu ça. C'est un "bravo" qui nous dit que oui, il faut continuer, que ce qu'on écrit touche, marque, plaît. Les lecteurs nous le disent déjà, évidemment. Un prix nous le dit différemment, c'est une reconnaissance supplémentaire, différente. Forcément, elle nous aide et nous renforce, elle aussi.


7 commentaires:

Danilomzb a dit…

Hello David,
Merci pour ta réponse, alors Tornade (enfin un fan des Xmen !!) choix intéressant. Pour ma part je me verrais bien en Mystique parce qu’elle est du côté des vilains, qu’elle est métamorphe et surtout très bleue, mais en vrai je préfèrerais être une magicienne :-)

Alors en passionnée de lectures imaginaires, je m’interroge toujours sur les sources des écrivains, oui où allez-vous chercher des idées pareilles tous ces mondes imaginaires ? Tu vois j’imagine toujours l’auteur qui se réveille en se disant : mais oui c’est ça l’idée ou qui s’inspire du quotidien … et toi comment ça te vient ?

Allez encore une petite pour la route : si tu étais l’invité du mois de juillet des deux vénérables de Book en Stock qui serais-tu ? (Pitié ne parle pas d’Alex on ne va pas pouvoir la calmer :-))
Danielle

Alex Ferder a dit…

Salut David,

Waouw trop cool toutes tes réponses
*alex sur la pointe des pieds faisant ses valises un ticket pour l'Alaska à la main*
C'est vraiment sympa ce principe d'interviews tous les jours
*alex qui résilie son forfait mobile et internet, démissionne, vend son vélo de maison*
Et les mémés ont l'air vrm sympas
*alex qui transfère tous ses comptes bancaires (nombreux et fournis) aux îles Caïman*

Un peu de sérieux, non mais oh

Je suis super déçue que tu n'écrives jamais de romance, j'espère que la semaine prochaine c'est la semaine des défis à la con, du genre "écrivez une romance intense entre un gnome et une banshee", vous avez deux heures. On pourrait faire ça, hein, Emma ? Mais juste ce mois :) (Emma elle me refuse jamais rien, tremble David, tremble !)

Bon j'avance sur le chant des géants, et j'ai remarqué des petits dessins qui entrecoupent le texte. C'est toi qui les as dessinés ? Qui les as choisis ? Qu'est-ce que cela apporte selon toi au texte ?

Autre chose (pardon, je suis très curieuse et pour une fois que je tiens un auteur, j'en profite), tu écris au présent dans le chant des géants. Mais what * ? Pardon pour cet anglicisme, mais le code de la fantasy c'est pas le passé, tu sais genre les verbes comme conquérir que tu dois conjuguer au passé simple ? que nous conquérissâmes, que nous conquérisiamions, que nous eusses conquéru (punaise je déteste conjuguer). Tout ça pour dire, serais-tu un briseur de codes ? C'est qu'il me semble bien puisque tu as dit que tu ne voulais pas écrire une romance parce qu'il y a trop de codes.

Petite question du soir : si tu étais un moyen de transport, lequel serais-tu donc ?

Alex

* mais comment ?

Fantasy à la carte a dit…

Bonjour David, moi aussi j'adore vivre entourée de livres, rien que pour le plaisir des yeux d'admirer mes bibliothèques bien remplies.

D'ailleurs, quand tu n'aimes pas un livre, est-ce que tu vas au bout ou est-ce que tu passes à un autre ?

Regina Falange a dit…

Bonjour David.
Cette interview est passionnante merci. Aucune question aujourd'hui (pour l'instant), mais juste pour te dire qu'après avoir refermé Que passe l'hiver j'étais incapable de sortir un autre roman de ma pal (et pourtant j'ai le choix !...) du coup hier je suis allée acheter La princesse au visage de nuit et j'ai hâte de découvrir cette nouvelle histoire. D'ailleurs je vois qu'il a gagné le prix des étoiles montantes de l'imaginaire. Quel effet ça fait d'avoir été d'une part sélectionné et puis récompensé par un prix? (ah ben si finalement une mini question oups)

Regina Falange a dit…

Ah c'est une nouvelle collection. Je ne savais pas, merci. Et effectivement tu es bien entouré. J'aime beaucoup Aurelie Wellenstein. Quel roman d'elle tu as préféré ? En parlant d'autres auteurs, as-tu déjà eu envie d'écrire à 4 mains ? Et pour en revenir à pocket, en tant que lecteur tu préfères les romans en grand format, en poche, relié avec couverture dure? Et en tant qu'auteurs ?

Dup a dit…

Bonjour David,

Lorsque je suis dans un salon ou un festival, j'ai l'impression d'être dans une bulle temporelle rien qu'à moi. C'est un moment que je n'ai absolument pas envie de partager avec mes proches. C'est égoïste ? Peut-être. Ceci dit mes proches ne comprennent absolument pas pour engouement alors... Mais malgré tout cela créé des dissentions, des tensions dirons-nous.
Qu'en est-il pour toi qui les enchaîne (la rançon de la gloire) ? Ta Davide ? Et tes mini-David le vivent-ils bien ?

Alex Ferder a dit…

coucou David,

je sais pas si on peut encore poster des questions, mais je tente, sur un malentendu on ne sais jamais - la semaine dernière était un peu compliquée au niveau du temps.

Ah oui les séparateurs de paragraphes (merci j'ai appris un nouveau mot) punaise j'avais même pas vu qu'ils étaient différents (je lis le soir, yeux fatigués et vieux) je vais être un peu plus attentive ! J'en suis à 40% et arf je trépigne de connaître la suite ! Je suis super frustrée, je dis à Bran de faire des trucs, mais tu crois qu'il m'écouterait ? Un coup des géants, ça c'est sûr !

En ce qui concerne le français, j'ai eu la même réflexion et j'écrirai au présent à l'avenir. Pour épargner mes pauvres BL et ma correctrice :) et pour écrire c'est vrai que c'est plus facile. en plus la différence entre l'imparfait et le passé simple, même à l'oreille j'arrive pas.

La marche comme moyen de transport, haaaannn, nan pffff (je déteste marcher, on l'aura compris). Je pensais à un truc plus funky, une catapulte, l'homme canon, une montgolfière. Les deux jambes c'est tellement commun ! à moins que tu marches sur tes mains ? alors là tu serais mon maître
Me vient une autre question du coup. Tu réfléchis mieux en musique ? comme c'est le même chemin, c'est aussi la même musique ? Genre à ce brin d'herbe là, je dois être à la troisième chanson de ma playlist ? Perso, si je mets de la musique (je roule deux heures pour aller bosser, et souvent je réfléchis à mes bouquins) je chante (mal) et donc impossible de réfléchir (c'est déjà compliqué en temps normal).

En ce qui concerne ta question, pourquoi écrire, la réponse est un peu amère. Pour vivre la vie que je n'aurai jamais - bon forcement vu que j'écris de l'UF les chances sont minimes. En fait c'est plus pour inventer des histoires qui me ressemblent (ah merde hahaha) et que je voudrais lire. C'est aussi un moyen de sortir ce qu'il y a en moi, d'inventer des persos qui ressemblent à des personnes que je déteste dans la vie et les torturer sans fin (non c'est pas vrai, même si parfois je m'inspire de certains traits de caractère).
Ecrire c'est assez naturel, j'ai toujours aimé ça, je dis pas que j'écris bien mais en tout cas ça me rend heureuse, c'est déjà pas mal.

Bon, tu es prêt pour les Imaginales ??

Alex