samedi 9 octobre 2021

Dixième page de l'ITV de RAPHAËL BARDAS

 


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— Comment qu’vous disez ? grommela mollement la Morue.
— Barre d’As ! sursauta Silas. Je crois qu’on parle du surnom de ma…
— Teu teu teu ! protesta Rossignol en gonflant son accordéon dans un vacarme qui empêcha Silas de terminer sa phrase.
Ils le regardèrent, se demandant bien ce que le musicien bavard allait encore inventer pour les baratiner et leur refourguer l’addition.
— Bardas ! s’exclama-t-il enfin. Raphaël Bardas ! L’homme qui se prétend écrivain et qui a fait de nous ses jouets quelques mésaventures durant.
— Mouaif, soupira la Morue. Jamais entendu parler.
— Un auteur de théâtre ? tenta Silas. Ce nom ne m’est pas complètement étranger, et je ne sais pourquoi, mais il m’évoque la presqu’île de Dados Rojos, ses vins trop forts et ses siestes crapu...
— Non Silas ! Quand cesseras-tu de ne penser qu’à…
— Qu’à ?
— Ce n’est pas vraiment le moment de parler d’amour mon tout beau. Alors non. Non, ou plutôt juste un peu oui, mais pas aussi exactement que ton joli ciboulot pourrait l’imaginer Silas. Le Bardas, c’est le sale type qui, depuis son monde à lui, nous trimbale de rade et rade, et port en port, et de mort en mort…
— Et de couche en couche !
— Oui ! Amis, oui !
— Et d’castagne en castagne ?
— Oui Morue, le Bardas, dans son monde, il est écrivain. Il a écrit des caisses et des caisses de livres à jouer, avec des amis, des jeux de rôles comme on dit là-bas. Parce qu’il a rien contre un peu de convivialité et une bonne histoire à vivre à plusieurs, pour peu qu’il y ait du claquos, de la vinasse et du sauciflard… et ce qu’il aime, en plus de raconter des histoires de copains, c’est nous les faire vivre à nous. C’est comme ça qu’un jour il a fait de nous les Chevaliers du Tintamarre et qu’il nous a embarqués dans le Voyages des Âmes cabossées. Mais bien avant ça, il s’est fourvoyé avec des gars comme le Gaborit ou le Granier de Cassagnac, et bien d’autres comme eux. Il a traîné ses guêtres d’auteur dans les Royaumes Crépusculaires ou encore sur Cosme, avant de se mettre à co-inventer ses propres univers. Amnesya 2K51, Venzia, Retrofutur !
—D’la confiture ?
— Non, Morue, mais ce qu’il invente parfois se voudrait tout aussi sucré… Capharnaüm, et le tout petit roman qui en fut tiré, Aux traîtres indomptables, du sucre, du miel, des épices et tellement de soleil ! Nul doute que c’est un peu ces amours là, ces univers qui le hantent, qui l’ont poussé à nous faire vivre ce qu’il nous a fait vivre.
— Ou mourir !
— Ou mourir oui… d’ailleurs, j’ai fini mon cruchon, qui qui paye la douloureuse ?
— Ce soir c’est Bardas les gars, c’est Bardas qui paye l’addition ! Hein Rossi, j’ai bon ?
— On dit « Qui régale » ! faut tout qu’j’vous apprende.
— C’est Bardas qui régale ? Rien n’est moins sûr les amis !


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Dup :

Raphaël, est-ce qu'il t'ai arrivé d'écrire en soirée avec, disons une "légère euphorie"? (c'est joliment dit n'est-ce-pas 😁).
Et le lendemain, le résultat te surprenait ? te convenait ? parfois ? jamais ?


Owrf... oui, de toute évidence, cela m'arrive, et même plutôt souvent. Disons que j'écris presque toujours en soirée, et donc presque toujours avec un verre et un bol de pipas à portée de main. De fait, une fois bien échauffé, il y a forcément des idées qui viennent, des répliques qui surgissent, et qui n'auraient peut-être pas franchi la barrière du réel si j'avais été dans un contexte plus... comment dire ? Inhibant ?

Enfin, je préfère préciser que je n'écris jamais en état d'ivresse, même dans les passages que certains ont pu qualifier de "WTF" (je serai d'ailleurs très curieux de savoir plus précisément quels sont ces passages...), et que tout reste malgré tout sous contrôle. Disons que la cohérence peut parfois être ébranlée, ou que le bon goût peut se voir relégué quelques plans en arrière... en général, si cela va trop loin, les passages en questions ne survivent pas à une première relecture. Certains seront dégagés par mon éditr... pardon... pour certains de ceux qui passeront le crible de ma propre auto-critique du bout goût, mon éditrice saura en général me suggérer avec diplomatie qu'il vaudrait vraiment mieux se passer de cette idée à la con 😁


 Fantasy à la carte :

Hello Raphaël, on peut donc en conclure qu'un petit verre ou deux t'aident à trouver l'inspiration. Remarque, chez certains auteurs, c'est certaines drogues hallucinogènes alors pourquoi pas. Sinon, j'espère que tu vas mieux puisque tu nous disais avoir été malade ?

Le podcast dont tu parles, c'est Entre Loire et Loing ? Je ne savais pas que tu en avais fait plusieurs, j'avais vu celui où tu présentais le tome 1 et je t'ai trouvé très drôle. J'aime bien ce support pour parler Imaginaire et présenter les livres, je trouve ça super vivant.

Sinon, selon toi qu'est-ce qui est le plus difficile, faire rire ou faire pleurer ?


Chère Jessica, fais gaffe, tu tires les questions en rafales, tu devrais repasser en manuel avant que quelqu'un ne soit blessé :D

Merci encore mille fois pour ta présence, et pour tes questions qui permettent d'aller assez loin dans l'analyse de mes propres procédés et dans l'exploration de mes "paysages intérieurs". Je crois que seul mon proctologue avait pu aller aussi loin jusqu'à ce jour :)
Trêve de plaisanterie : les entretiens qui me sont offerts ici m'ont permis de me remettre à écrire, de retrouver l'appel du clavier.
Depuis juin j'avais laissé de côté mon projet en cours, faute de temps, d'envie, faute aussi de phase avec mon propos. Parler avec vous ici a fait ressurgir quelques nécessités. Hier après-midi j'ai écrit un chapitre entier, dont je suis très content d'ailleurs. Et comme c'était en après-midi, pas une goutte d'alcool au programme, rien que du café et du bissap ;)
Ce qui me permet de rebondir sur une fausse impression que j'ai peut-être donnée : j'aime bien boire un verre lorsque j'écris le soir, mais en réalité cela ne m'est absolument pas nécessaire. Cela peut en effet lever certaines inhibitions et me faire gagner du temps pour mettre au jour certaines idées farfelues ou moins acceptables, mais en réalité ce n'est qu'un accessoire, et un petit plaisir de quadra qui se regarde dans sa posture d'artiste. Une touche d'épicurisme aussi probablement. Je crois sincèrement être un jouisseur, un bon vivant, mais je n'ai pas besoin de picoler pour trouver l'inspiration :)
Merci en tout cas de m'avoir offert la possibilité de lever le doute à ce sujet, car j'imagine qu'avec les personnages que je mets en scène on peut facilement mal interpréter cet aspect-là de ma personnalité.

Quant à ma santé, cela va mieux, un peu. Un lumbago traîné pendant une semaine pour avoir dormi sur un vieux matelas par terre... du repos et une pommade antiinflammatoire me permettent de retrouver un peu d'élasticité, mais je crois que je vais éviter de reprendre le sport cette semaine pour ne pas arriver aux Imaginales plié en deux.

Le podcast est en effet sur la chaine Entre Loire&Loing, et plus précisément son magazine culturel du samedi matin. Celui que vous avez vu était une interview, disons qu'on m'avait demandé de venir présenter un peu ma carrière... ça devait durer 5 minutes mais ils n'ont pas réussi à m'arrêter, je me suis amusé à truster le truc et à faire mon show. J'ai cru gonfler tout le monde mais finalement ils ont presque tout gardé :)

Et comme ma prestation a pas mal fonctionné et que le président de la Radio et de la WebTv est un grand fan d'Imaginaire, il m'a contacté quelques jours plus tard pour me proposer de devenir chroniqueur. J'ai accepté à la condition que ce ne soit pas destiné aux connaisseurs mais au grand public, et c'est exactement ce qu'il voulait alors on a commencé à travailler dessus. Mon projet ici, c'est de réconcilier le public qui se croit sérieux car il ne lit que de livres de littérature générale avec les littératures de genre. Montrer que nos imaginaires font aussi des littératures d'idées et que nos livres ne sont pas que des machines à produits dérivés, des ouvrages infantilisants et des clones d'Harry Potter, de Starwars ou du Seigneur des Anneaux. Les connaisseurs n'y trouveront pas leur compte et penseront même probablement que je fais des raccourcis abusifs ou que ce que je dis des littératures de l'Imaginaire est superficiel voire imprécis. Mon projet est vraiment de faciliter l'accès et de mettre un terme à quelques clichés, mais du coup ces clichés il faut les afficher, les décrypter et les démonter, et c'est là que je m'éclate. Je fais à ma façon hein, un peu intello-rigolo. En tout cas je m'amuse beaucoup. On en a tourné trois de cinq minutes chacune environ, mais nous n'étions pas complètement satisfaits du dispositif. Le texte et l'interprétation fonctionnent, mais on faisait ça face caméra dans un environnement vaguement steampunk et un peu trop figé, alors on va tenter autre chose en allant tourner avec les mêmes textes mais en mouvement, dans des librairies et des médiathèques de notre secteur géographique. Le plus dur pour le moment est de trouver un moment pour le tournage.

Le plus difficile entre faire rire et faire pleurer ? J'entends toujours dire que de faire rire est plus difficile... j'imagine que si on veut le faire avec de l'humour de qualité cela doit être vrai. Dans mon cas ce n'est pas exactement cela. Comme je le dis souvent, mon humour ne fait pas partie du projet, je ne le travaille pas vraiment. J'essaie juste de rendre publiable et d'affiner ce qui me vient de façon plus spontanée. J'ai tendance à ne pas respecter grand chose, alors les conneries me viennent facilement. C'est loin d'être toujours un avantage et je sais d'ailleurs que mon humour ne convient pas vraiment à tout le monde. Il y a aussi ceux qui ne voient pas que c'est de l'humour et qui prennent mes situations et dialogues au premier degré... tant pis, des fois on rate.

Faire pleurer je ne sais pas faire. J'aime qu'on me dise qu'un de mes textes a été émouvant, mais je n'ai pas encore essayé d'obtenir ce résultat là. C'est difficile je pense. Ne serait-ce que parce qu'il faut parvenir à faire la différence entre ce qui est explicitement perceptible par tous, et ce qui ne l'est que par nous, auteurs, car nous savons ce que la scène dissimule d'éléments personnels implicites. La révélation sur la quête de Margot et sa véritable relation avec Iago a été très émouvante pour moi, parce que je sais à quoi cela me renvoie de mon propre passé et de mon histoire intime. J'espère avoir suffisamment travaillé le texte et ses dimensions émotionnelles et scénaristiques pour qu'il y ait à ce moment là surprise et émoi, mais je ne suis pas complètement certain de l'effet que cela a, individuellement, sur le lecteur. Est-ce joyeux ? est-ce triste ? Est-ce qu'en fait on s'en fout ?
Du coup je ne sais pas... je crois que ce qui est le plus facile, n'est pas de faire rire, ni de faire pleurer. Le plus facile à mon sens c'est de susciter le dégoût.

3 commentaires:

Fantasy à la carte a dit…

Hello Raphaël, on peut donc en conclure qu'un petit verre ou deux t'aident à trouver l'inspiration. Remarque, chez certains auteurs, c'est certaines drogues hallucinogènes alors pourquoi pas. Sinon, j'espère que tu vas mieux puisque tu nous disais avoir été malade ?

Le podcast dont tu parles, c'est Entre Loire et Loing ? Je ne savais pas que tu en avais fait plusieurs, j'avais vu celui où tu présentais le tome 1 et je t'ai trouvé très drôle. J'aime bien ce support pour parler Imaginaire et présenter les livres, je trouve ça super vivant.

Sinon, selon toi qu'est-ce qui est le plus difficile, faire rire ou faire pleurer ?

Ramettes a dit…

Bonsoir,
Contente que nos questions est stimulé ton imagination... tes écrits eux stimule notre imagination.
Je restée un peu bloquée par les plumes de griffons, les ongles de je ne sais plus quoi et l'hallucinium... que de substances étranges... c'est une impression ou tu aimes pousser à l'extrême tes personnages ? dépasser leur limites... ainsi que toutes les frontières comme par exemple la vie et la mort ?

Fantasy à la carte a dit…

Bonjour Raphaël, je pense que je vais ranger mon flingue pour un temps. Lol. J'avoue que c'était trop tentant que de ne pas te taquiner sur la question du petit remontant vu que certains mots revenaient souvent comme "ti punch". C'était facile. Voilà une bonne nouvelle si cela t'a ouvert de nouvelles perspectives d'écriture, nous verrons ce que ce chapitre donnera, peut-être sur un nouveau volet des aventures de notre trio de chevaliers. D'ailleurs, que fais-tu en cas de panne d'inspiration ? As-tu des petits rituels ? Ou tu laisses tomber, et tu y reviens quand l'inspiration et l'envie reviennent ?