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☇ L'avis éclair de Phooka sur La sonde et la taille ☇
Quelle claque, bon sang mais quelle claque. Grande fan de Conan depuis toute petite, j'avais lu tout ce qui était sorti chez Neo et J'ai Lu à l'époque. J'adorais son univers sombre, violent et sans concession. Évidemment j'ai vu (et revu et rerevu) les films de Milius. Depuis, je ne m'y suis jamais replongée, gardant cette lecture comme une madeleine de Proust (un peu sanglante la madeleine mais bon ...) . Quand Albin Michel Imaginaire a commencé à teaser la sortie de La sonde et la taille, j'avoue avoir hésité. Hésité parce c'est Conan et que j'avais peur de ne pas retrouver l'univers de "mon" héros tel que dans mon (lointain) souvenir. Hésité aussi parce que le pitch annonçait un Conan vieillissant et malade (un peu comme moi du coup ...) et que je n'avais pas envie de le voir vieillir signifiant mon propre vieillissement aussi (oui je sais appelez un psy si vous voulez). Bref ... Mais le discours de Gilles Dumay, qui disait en substance que le roman l'avait scotché, m'a incité à me lancer.
Dès les premiers pages j'ai su que le roman allait me plaire. Tout y est: la violence sans concession, la noirceur, la mort dont dépend la vie (ou l'inverse), les grandes étendues, les mystères et Conan. Conan, le roi des Sept Nations. Un roi vieillissant et malade que les discours politiques et autre salamalecs ennuient toujours autant. D'autant plus qu'il souffre et qu'il doit serrer les dents sur le trône pour écouter ses sujets tergiverser et essayer de l'entuber parce qu'ils pensent tous qu'il est sénile. Mais Conan reste Conan et quand il faut taper du point sur la table il le fait. Pourtant il n'aspire qu'à une seule chose: qu'on lui foute la paix. Bon il a toujours été comme ça notre barbare. Pas causant, préférant les actes aux paroles. Mais Conan est las et malade. Il a du mal à garder sa grande carcasse debout, il souffre. Il est vraiment très vieux et il sait qu'il va mourir bientôt et pas d'un coup de hache. Pourtant il veut régler les problèmes avant de partir. Une dernière fois. Un dernier baroud. À sa façon. Mais le temps presse, parce que les ennemis sont aux portes et justement du temps, il ne lui en reste de toute façon plus beaucoup. Heureusement, il peut compter sur son ami de toujours Tokaiev, son Khajym et sur son capitaine de la garde royale,Cassius. Et Conan a un trésor qui lui donne la force de survivre: son fils adoptif, Colin. Colin c'est la touche de ciel bleu dans un univers de tempête. Petit, difforme, un peu idiot (pas qu'un peu d'ailleurs), il est l'étincelle, le minuscule rayon de soleil de tout le roman et de tout l'univers de Conan. Il permet de croire en l'humanité. Colin et ses chèvres, c'est un diamant brut au milieu du charbon. Les gens s'entretuent oui ... mais il y a Colin. Il reste donc une chance pour l'humanité.
Le récit se resserre sur quelques jours, quelque part en Hyperborée chaque action est détaillée, expliquée avec une profusion de mots qui visent toujours juste. On y retrouve l'hypocrisie des prêtres et des ducs. Rien ne change en ce bas monde, Conan a toujours des comptes à régler avec ceux-là! De nombreux personnages jalonnent ce roman, tous très différents mais pourtant ils se fondent parfaitement dans le décor. Ils ont tous leurs attentes, leurs envies et ils constituent la trame du récit. Une trame au-dessus de laquelle trône Conan qui malgré sa décrépitude a encore la mainmise sur tous. Ou presque ... Et ça il doit le régler urgemment.
Alors comme au bon vieux temps, quand Conan tuait à tour de bras, le sang va couler. Mais pas que le sang d'ailleurs, toutes sortes de fluides corporels vont vous éclabousser au cours de cette lecture. Parce que la mort n'est pas propre et léchée. Elle ne l'a jamais été dans les romans d'Howard. Les blessures sont horribles, la souffrance toujours présente, la déchéance et la mort sont contées par le menu. Ne croyez pas que cette violence soit du voyeurisme ou autre artefact pour attirer le lecteur. Non loin de là. Tout ceci fait partie intégrante de l'univers du Cimmérien. Ça l'a toujours été et ça le reste. Et c'est l'atmosphère si particulière de ce roman, mais aussi du monde dans lequel évolue Conan en général.
La question à laquelle il m'est plus difficile de répondre: faut il connaître l'univers de Conan avant de se lancer dans cette lecture? Sans doute pas. Idéalement si vous avez au moins vu les films avec Schwarzenegger, ce serait une bonne chose, histoire d'avoir une idée du contexte. Mais même sans, il est parfaitement possible de s'immiscer dans ce récit, grâce au talent de Laurent Mantese qui au delà d'un récit à propos de Conan, crée une atmosphère incroyable, noire, brute et féroce, sans le moindre soupçon de bonté ... sauf Colin, cette petite lumière qui brille au fond des ténèbres. C'est de la fantasy épique comme il y en a peu ces derniers temps (ou du moins comme j'en lis peu ces derniers temps). C'est une grosse claque dont on se remet difficilement. Pour un premier roman, il faut reconnaître que l'auteur a dû taper fort. Très fort même.
La sonde et la taille est un roman de fantasy épique dont vous vous remettrez difficilement et si le voyage au fil des pages est rude et douloureux, il n'en restera pas moins un voyage extraordinaire que vous n'oublierez pas de sitôt.
Je vous conseille de lire la très belle chronique de Just a Word qui donne moult détails si vous n'êtes toujours pas convaincu.
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