Éditions Michel Lafon
414 pages
19,95 euros
4ème de couv :
Fuyant un régime sanguinaire et un pays en guerre, Adam a envoyé sa femme Nora et sa fille Maya à six mille kilomètres de là, dans un endroit où elles devraient l'attendre en sécurité. Il les rejoindra bientôt, et ils organiseront leur avenir.
Mais arrivé là-bas, il ne les trouve pas. Ce qu'il découvre, en revanche, c'est un monde entre deux mondes pour damnés de la Terre entre deux vies. Dans cet univers sans loi, aucune police n'ose mettre les pieds.
Un assassin va profiter de cette situation.
Dès le premier crime, Adam décide d'intervenir. Pourquoi ? Tout simplement parce qu'il est flic, et que face à l'espoir qui s'amenuise de revoir un jour Nora et Maya, cette enquête est le seul moyen pour lui de ne pas devenir fou.
Bastien est un policier français. Il connaît cette zone de non-droit et les terreurs qu'elle engendre. Mais lorsque Adam, ce flic étranger, lui demande son aide, le temps est venu pour lui d'ouvrir les yeux sur la réalité et de faire un choix, quitte à se mettre en danger.
Lorsqu'on achète ce livre, on se dit 410 pages, 20 euros, normal. Sauf que là je dis qu'il y a un peu du foutage de gueule et ce n'est pas la première fois que je me fais cette réflexion avec cet éditeur. C'est écrit avec une police spéciale mal-voyant, les interlignes et les marges sont grandes. Bref on achète pas mal de vent, il fallait que ça soit dit !
Mais bon, en l'occurrence pour ce cas là, je m'en fous car le vent souffle entre des mots qui m'ont beaucoup touchée. Les mots d'Olivier Norek se dressent tels les arbres d'une forêt et le vent siffle très fort. Ce son est lugubre, il glace le sang et l'impact est encore plus fort. Il accentue l'indignation véhiculé par ce récit, la colère, la honte, la fatalité... bienvenue dans la Jungle de Calais.
Ce nouveau roman de l'auteur restera longtemps gravé dans ma mémoire tant il a suscité en moi d'émotions fortes. Point de capitaine Coste mais qu'importe, l'auteur n'a pas son pareil pour nous en créer des nouveaux qui font battre notre coeur. Dieu que je les ai aimés ces personnages. Adam surtout.
L'enquête policière que nous suivons quitte le 9-3 pour intégrer la ville de Calais avec Bastien, un flic de Bordeaux ayant demandé sa mutation pour raison familiale. Cette ville que tout flic aimerait quitter, mais ne peuvent pas : les transferts sont gelés, mis sous le coude pour maintenir l'effectif. Tous les enquêteurs mis sur l'affaire que suit Bastien, issus de services différents, se connaissant à peine, vont former une équipe soudée que la volonté de justice transcendera. Les liens seront aussi forts que dans l'équipe Crime 1 de Coste.
Et puis il y a Adam... Adam, flic syrien, coincé entre le marteau (Bashar el-Assad) et l'enclume (Daesh). Adam qui a tenté de faire éclater la vérité sur le régime syrien aux yeux de la communauté internationale et qui se fait rattraper. Lui et sa famille doivent fuir, direction l'Europe, l'Angleterre. Il envoie d'abord sa femme et sa fille, elles passeront par le nord de l'Afrique jusqu'en Lybie puis traverseront la Méditerranée, l'Italie. Lui partira plus tard, pas le choix, par le nord, la Turquie.
La réalité de ces migrants soumis aux moindres desiderata des passeurs, sur terre, sur mer. C'est dur, très dur. Et le pire est à venir : Calais, la Jungle, l'Angleterre pas loin et la quasi impossibilité de l'atteindre. Les plans foireux, mortels, tentés inlassablement. Repoussés inlassablement. Une valse macabre qui ne peut pas laisser insensible.
Comme à son habitude Olivier Norek n'en rajoute pas, il nous livre juste un état des faits. La réalité telle qu'elle était avant le démantèlement. Ainsi j'ai appris que ce terme de Jungle que je pensais péjoratif venait en fait des premiers migrants, essentiellement des Afghans alors, car le camp était proche d'une forêt et qu'en langue perse forêt se dit jangle. Une véritable zone de non droit quelque soit le camp : migrants - forces de l'ordre - ONG.
Cette histoire que nous livre l'auteur avec son style toujours aussi fluide et entraînant, prend sérieusement aux tripes. D'autant qu'il réussi le juste équilibre pour qu'on ne puisse prendre partie pour l'un des camps. Et le plus remarquable dans cet équilibre maintenu, c'est qu'Olivier Norek ne se prive pas de nous balancer des vérités, celles qui font mal. Il y va franchement et dénonce à tour de bras. Tout le monde en prend pour son grade, politiques, RG, Services spéciaux, Services sociaux...à juste titre. Et ça passe, bien sûr que ça passe, car tous ses personnages sont profondément humains. Je n'ai pas compté le nombre de fois où j'ai eu les larmes aux yeux. Mais on trouve également quelques moments de soulagement intenses, de vrais rayons de soleil dans toute cette noirceur. De quoi remettre un peu de baume au coeur.
Je ne peux que vous encourager à lire ce magnifique roman, plus qu'un policier, plus qu'un thriller, une aventure humaine inoubliable. Oui j'ai aimé Coste et son équipe, mais jamais je n'oublierai Adam, Bastien et Kilani. Non, je ne vous en ai pas parlé du petit Kilani... c'est fait exprès !
Bravo monsieur Norek, sincèrement.
Olivier Norek sur Bookenstock
Un T/P pour le challenge de la Licorne !