TROISIÈME VOLET DE L'ITV DE PAUL BEORN
Pour relire le premier épisode c'est par ICI
Le second LÀ
Pour bien profiter de ce texte, je vous conseille d'aller relire celui de son premier "Mois de" ;)
Dup — Cette fois, j’espère que c’est la bonne.
Elle pousse la porte de l’auberge.
Phooka— Tu parles. Ça fait trois ans qu’on le cherche.
Dup — Prépare les menottes, au lieu de ronchonner.
Phooka — Purée, il y a foule dans cette auberge.
Dup (chuchotis) — On interroge les clients. Commence par le barbare, là, dans le coin.
Phooka — Tu es sérieuse ? Ce type fait deux mètres cinquante et il a une hache à deux mains dans le dos.
Dup — Beorn adore les guerriers avec des haches, c’est son côté Gemmel. Il lui a peut-être parlé.
Phooka s’avance jusqu’au barbare. C’est une montagne de muscles, ses bras sont couverts de cicatrices et de tatouages. Elle lui colle sous le nez un portrait de Beorn.
Dup — TOI AVOIR VU LUI ?
Barbare — Gente dame, jamais n’ai-je vu cet ours de ma vie.
Soudain, Dupinette se glisse derrière lui et abat un filet sur sa tête.
Barbare — Au secours !
Phooka — Tu es folle ? Qu’est-ce qui te prend ?
Dup — Passe-lui les menottes, vite !
Phooka attache le barbare à la chaise. D’un air soupçonneux, elle ôte son casque à cornes, puis sa hache, puis sa cotte de mailles, puis ses faux muscles, puis les coussins de rembourrage dessous. Finalement, il ne reste qu’un petit nounours apeuré.
Dup — Bingo !
Phooka — Trop forte ! Comment tu as deviné que c’était lui ?
Dup — Il mangeait une tablette de chocolat aux noisettes. Et il avait un tatouage « I 💓Tolkien » sur l’épaule.
Phooka— Alors, monsieur Beorn ? On se cache parce qu’on a laissé ses lectrices et ses lecteurs mariner trois ans pour son tome 2 de Calame ?
Beorn — Je vous reconnais ! Vous êtes les deux folles qui enferment les auteurs dans une cave pour les faire parler ! Vous m’avez déjà torturé une fois !
Dup — Ouais. Et on va recommencer.
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Je commence Calame tome 1 youhou. Comme ça fait 3 ans qu'il attend son tour dans ma pal, j'ai le beau gros grand format, depuis le poche est paru, est en changeant de taille, il a aussi changé de tête. Que penses-tu des deux couvertures ? As-tu une préférence ? D'ailleurs participes-tu aux idées de couvertures ou sur le choix final ?
Paul Beorn :
Yeah ! Félicitations ! 😀 (et bonne lecture)Stéphane (Marsan), mon éditeur chez Bragelonne, me demande toujours si j’ai des idées pour une couverture et il me demande aussi mon avis une fois le premier croquis réalisé. Il en tient vraiment compte, mais seulement en partie puisque au final, c’est lui qui décide (j’ai connu la même façon de travailler auprès de tous les autres éditeurs de ma connaissance).Par exemple, pour Calame T1, l’illustrateur avait d’abord dessinée Maura en princesse arabe montée en Amazone sur un tapis en soie… J’ai éclaté de rire. Bien sûr, ça a été modifié.La couve du grand format, je la trouve jolie mais un peu « jeunesse ». J’avais suggéré un objet ou un bâtiment, sans personnage, mais Stéphane n’était pas convaincu. La couverture du poche est vraiment très belle, je ne sais pas si elle vend bien le roman mais moi j’aime bien la regarder. J’ai demandé à rajouter la petite feuille qui pousse sur le dragon de bois (je ne sais pas si les gens la remarquent ; pour moi, c’est le symbole de la « renaissance » de Darran quand il prend la tête de la colonne).J’ai aussi conscience que ce n’est pas mon métier et qu’il faut laisser à l’illustratrice/illustrateur un peu de liberté créative, comme j’en ai eu moi-même pour écrire le roman.
Fantasy à la carte :
Bonjour Paul, ouah je suis très impressionnée par ta capacité de mémorisation. Restons sur la thématique de l'écriture, tu fais un plan au préalable ou tu écris au fur et à mesure que les idées viennent ?
Paul Beorn :
Pour moi, un roman commence toujours avec une scène précise. Ici, c’était la rencontre entre Maura et Darran, dans la forêt. Ensuite, je lance le « bouillonnement créatif » : je note toutes les idées qui viennent, je fais des ponts entre elles, j’en parle à deux ou trois personnes, je lis des romans dans la même thématique et puis, oui, je rédige un plan pas très détaillé.J’aime beaucoup avoir un plan, ça me rassure. En fait, ce plan me met suffisamment en confiance pour… partir dans tous les sens, et ne pas le suivre –sauf de loin en loin, quand je bloque. Je regarde parfois avec tendresse mes plans de départ qui n’ont plus grand-chose à voir avec le roman final.Calame devant comporter trois tomes, initialement, par exemple, mon plan est formel. ^^Donc oui et non, je ne navigue pas complètement à vue, mais j’improvise beaucoup. Et d’un roman à l’autre, cela peut changer.
Zaphrina :
J'ai repris ma lecture de "Calame". Je sais je suis longue mais mon boulot me prend aussi mon samedi (factrice) même si je suis dégoûtée. J'aurai du avoir mon samedi mais en haut lieu ils ont refusé. Pas assez de personnel. enfin, je rentre pas dans les détails. On s'en fout. J'adore Maura. Et la construction de l'histoire est juste parfaite. Honnêtement, vous concernant, je n'ai aucune inquiétude. C'est pour moi une valeur sûre. Pour Silène Edgard, j'avais déjà lu "14-14" que j'avais adoré. Et pour dire, je m'en souviens encore.
Paul Beorn :
Oh… Bon courage pour la négo avec le haut-lieu, quelle plaie de travailler le samedi.Je suis toujours le plus heureux des auteurs quand une lectrice ou un lecteur aime mes romans. Je n’ai pas vraiment d’autre ambition dans la vie, je crois. Alors merci à vous ♥.
À SK et Olivier : Paul vous souhaite une bonne lecture
SK :
Merci déjà d'ouvrir le tome 2 sur les aventures de Grante ;) J'adore l'idée du Calame. La croyance qui crée l'existence. C'est le cas du lapin de Pâques, du père Noel, des dieux et des légendes en général... du coup, une question personnelle à laquelle tu n'es évidemment pas tenu de répondre si elle te parait trop privée: Es-tu croyant ou spirituel ou pas du tout (ce qui est mon cas mais ne m'empêche pas d'apprécier le Calame et les légendes) et est-ce que cela influence ta façon d'écrire?
Paul Beorn :
Question personnelle en effet, mais c’est bien l’esprit de cette interview alors allons-y !Je ne suis pas croyant.Est-ce que cela influence dans ma façon d’écrire ? Certainement, comme tout ce qui fait partie de moi, mais ce n’est pas un thème majeur dans mes romans. De manière générale, ce qui m’intéresse le plus, ce sont plus les gens et ce qu’ils font de leurs croyances, plus que leurs croyances en elles-mêmes.-attention ! divulgâchage-Pour le calame, je ne pensais pas vraiment aux religions, mais je comprends ce que tu veux dire. La fantasy permet souvent de parler de manière détournée de thèmes contemporains. Ici, je pensais à la force qu’une idée peut prendre quand elle est partagée par des millions de gens. Bien sûr, dans la réalité, cette force ne peut pas modifier les lois de la physique, mais elle peut tout de même avoir des conséquences considérables : les idées de hiérarchie des races du nazisme ont eu les conséquences que l'on sait sur des millions de gens, les idées des Lumières et la révolution française également, d’une toute autre manière. Je vois cela comme des mouvements titanesques, presque des forces de la nature. Et quand cette force s’incarne dans un individu, à la fois il détient un formidable pouvoir et à la fois il n'est plus tout à fait lui-même dans les millions de regards qui convergent vers lui. Cela a toujours existé, mais à notre époque, ce phénomène prend une tournure nouvelle à l’heure des « fake news » qui font tant de mal et de l’obsession chez beaucoup de gens du « buzz » à tout prix et de la célébrité.Pardon si cela écorne un peu l’aspect merveilleux et « lecture d’évasion » que permet la fantasy, mais je crois que les histoires résonnent en fait mieux en nous quand elles nous rappellent, même de loin et d’une manière romanesque, le monde dans lequel nous vivons.
Fantasy à la carte :
Hello Paul, tu écris exclusivement chez toi dans le silence ou au contraire, tu as besoin de bruit et d'animation autour de toi pour pouvoir écrire ? Bon j'avoue en ce moment, c'est foutu d'aller écrire dans un café mais avant la covid, tu faisais comment ?
Paul Beorn :
Il y a des années, j’étais convaincu que je ne pouvais écrire qu’à mon bureau dans le silence le plus complet. Et puis, ahahah, comment dire ? J’ai eu trois enfants…Aujourd’hui, je peux écrire avec un marteau piqueur à côté, l’ordi sur les genoux et le chat posé sur ma tête : j’ai vécu pire.En revanche, je n’arrive pas à écrire en musique. Quand j’écoute de la musique, pour moi, tout s’arrête, je suis entraîné loin loin d’ici. Je peux en écouter avant, pour l’inspiration, mais pas pendant. Un décollage d’avion à réaction me gêne moins.
Nahé :
De mon côté, je suis ravie de retrouver l'ambiance d'il y a 3 ans. J'ai aussi pu profiter d'une visite de Paris joyeusement animée et je viens de quitter Thiercelieux. Ravie !
Par contre, c'est un peu plus coton pour les questions 😏 D'entrée de jeu, le(s) confinement a été évoqué pour son impact sur la sortie des romans; d'un autre côté, la situation actuelle vous a-t-elle inspiré ?
Paul Beorn :
Eh ! Tu les dévores ! :D :DMerci pour la bienvenue (dans cette cave attaché au mur)(et fouetté !!!)(et affamé aussi !!!).La situation actuelle ne m’inspire pas grand-chose pour l’instant ; je veux dire : pas d’envie particulière d’écrire à ce sujet. Cela viendra peut-être avec le temps. Qui sait de quoi l’inspiration de demain sera faite ? C’est toujours une surprise pour moi. JEn revanche, cette situation ne m’a pas non plus empêché d’écrire. J’ai des copains et copines qui ont perdu le goût d’écrire à cause de l’inquiétude, du stress et des deuils.
Régina / Élodie :
Paul Beorn :
Ouiiii ! C’est aujourd’huiiiii !Oh, quand un roman sort, c’est toujours la même excitation et le même bonheur que la première fois ! C’est mon rêve d’enfant qui se réalise.Les avis de lecteur, je les lis tous, comme la plupart des autrices et auteurs, je crois.Je vis les avis négatifs de la même façon que je vivrais une aiguille qui se planterait dans ma chair. Je pensais qu’avec le temps, ce serait plus facile, mais non. Quand j’ai entendu Robin Hobb elle-même dire en table-ronde qu’elle ne s’y était jamais habituée non plus, j’ai compris que c’était à vie.C’est comme ça, ça fait partie du jeu. En fait, c’est le principe même de lâcher la main à son roman et de le laisser faire son chemin dans le monde, de le rendre public : il ne m’appartient plus et chacun peut bien en penser ce qu’il veut.En revanche, j’ai une règle d’or : ne jamais jamais jamais répondre à un avis négatif, même si intérieurement, on a toujours envie de le faire. Il faut apprendre à respirer un grand coup et à se remettre à écrire. Je croise les doigts, mais j’en ai reçu vraiment très très peu jusqu’à présent.Heureusement, les avis positifs (et par bonheur ils sont très nombreux) me remplissent toujours du même bonheur extatique.Oui, je suis une éponge sentimentale, c’est une vraie catastrophe.Ensuite, après plusieurs mois, une autre question pointe le bout de son nez : les ventes sont-elles bonnes ? ou non ? En général, je reçois un mail de Stéphane au bout de quelque semaines qui me donne la tendance, et j’ai les chiffres définitif un an plus tard.C’est une vraie roulette russe : impossible de prévoir si ce sera un succès ou non. « Calame » T1 a reçu d’aussi bons avis et critiques (en fait, même meilleurs) que « Le Septième Guerrier-Mage », mais il ne se vend pas alors que l’autre cartonne. Pourquoi ? Mystère. Pas la bonne période. Pas le bon thème. D’autres bouquins trop proches sortis en même temps. Mauvaise couve. Tome 2 pas encore sorti…Je ne sais pas : on se trouve des raisons à chaque fois mais au fond, on n’en sait rien.Un échec commercial ne me chagrine pas plus que ça. Je préfère quand un roman se vend bien, mais comme je le disais plus haut, j’ai un autre métier à côté alors je ne mourrai pas de faim. Le principal, pour moi, c’est que les gens qui l’ont lu, même s’ils sont peu nombreux, aient apprécié leur lecture. Et de pouvoir continuer à écrire mais pour l’instant, mes éditeurs sont toujours partants alors ça me va. 😊
Tout à fait d'accord pour un imaginaire qui puise ses racines dans le monde réel et qui quelque part tend un miroir romanesque. La question des droits des femmes, mais aussi de la réalité des gays, et aussi par petites touches des personnes de couleur est parfaitement amenée dans Calame 2. Intéressant aussi le traitement de la difformité avec le visage brûlé.
Paul Beorn :
Je suis content que tu aies remarqué tout cela. Ce sont des aspects importants du roman, pour moi.SK :
J'ai beaucoup aimé aussi la figure du héros malgré lui, je ne veux pas trop en révéler ici mais c'est fascinant de voir que le "héros" (même si Maura est le vrai personnage principal) n'avance que parce que le Calame l'y oblige et que son seul voeu est d'en être libéré. Ca apporte une crédibilité à l'ensemble, plutôt que le classique (et bien ennuyeux) combattant dévoré d'ambition qui avance pour acquérir le plus de puissance possible que l'on retrouve un peu partout dans la littérature de l'imaginaire et plus largement aventure. Est-ce un point qui était particulièrement important pour toi ?
Paul Beorn :
Oui, c’est aussi un point important pour moi.Mes personnages principaux ne sont jamais des princesses, des rois ou des grands personnages. Je m’intéresse aux petites gens ordinaires, celles et ceux qu’on pourrait rencontrer au coin de la rue (pour peu que cette rue soit dans un monde de fantasy).Les premiers personnages de fantasy que j’ai rencontrés étaient ceux de Tolkien : des hobbits, des créatures inoffensives et minuscules tirées de leur confort, qui ne demandent rien et à qui on demande beaucoup. Même si mes références se sont diversifiées et que mes univers trouvent maintenant leur inspiration ailleurs, je crois que ces personnages m’ont marqués à vie et me correspondent bien.
La suite de l'interview PAR ICI (bientôt)
14 commentaires:
Hello Paul, tu écris exclusivement chez toi dans le silence ou au contraire, tu as besoin de bruit et d'animation autour de toi pour pouvoir écrire ? Bon j'avoue en ce moment, c'est foutu d'aller écrire dans un café mais avant la covid, tu faisais comment ?
Une intro en fanfare 😂 Je ne sais pas trop s'il est juste de souhaiter la bienvenue dans ce mois de...
De mon côté, je suis ravie de retrouver l'ambiance d'il y a 3 ans. J'ai aussi pu profiter d'une visite de Paris joyeusement animée et je viens de quitter Thiercelieux. Ravie !
Par contre, c'est un peu plus coton pour les questions 😏 D'entrée de jeu, le(s) confinement a été évoqué pour son impact sur la sortie des romans; d'un autre côté, la situation actuelle vous a-t-elle inspiré ?
Jour de sortie pour Calame tome 2. Comment te sens-tu lorsque l'un de tes romans sort? Et comment gères-tu les avis des lecteurs ?
Tout à fait d'accord pour un imaginaire qui puise ses racines dans le monde réel et qui quelque part tend un miroir romanesque. La question des droits des femmes, mais aussi de la réalité des gays, et aussi par petites touches des personnes de couleur est parfaitement amenée dans Calame 2. Intéressant aussi le traitement de la difformité avec le visage brûlé.
J'ai beaucoup aimé aussi la figure du héros malgré lui, je ne veux pas trop en révéler ici mais c'est fascinant de voir que le "héros" (même si Maura est le vrai personnage principal) n'avance que parce que le Calame l'y oblige et que son seul voeu est d'en être libéré. Ca apporte une crédibilité à l'ensemble, plutôt que le classique (et bien ennuyeux) combattant dévoré d'ambition qui avance pour acquérir le plus de puissance possible que l'on retrouve un peu partout dans la littérature de l'imaginaire et plus largement aventure. Est-ce un point qui était particulièrement important pour toi?
C'est clair que la musique ça transporte et de fait, distrait. Pourquoi écrire de l'Imaginaire ? Y a t-il un ou plusieurs auteurs qui t'ont donné envie d'en écrire à ton tour après avoir lu leurs livres ? Si oui, lesquels ?
Bonjour, je n’ai pas de question, je ne fais que lire :) Je voulais juste dire que du coup j’ai vite été acheter Calame car ça me donnait trop envie... et j’ai lu 200 pages en deux jours!!! Ohlalaa c’est vraiment chouette et Maura me fait revivre mes quelques mois vécus en Ecosse (je ne sais pas trop pourquoi...) merci beaucoup
Les minorités, les différences, le regard de l'autre (et surtout le fait qu'on est toujours l'autre de quelqu'un). la tolérance et l'acceptation de soi, ce sont des thèmes qui m'intéressent dans mes propres écrits, donc je me réjouis quand je les vois traités (et si bien ici). Pour l'instant je n'ai lu que les 2 Calame. Quel roman me conseillerais-tu pour continuer à explorer les univers de Paul Beorn?
j'ai lu dans cet interview que je bois comme du petit lait ( en vrai je préfère le chocolat chaud ) que ces dernières années tu ( j'ose tutoyer, j'espère ne pas vexer) avais appris à écrire tes romans le mieux ^possible. peux-tu ( oui, je récidive) dire comment tu as fait?
Ok, j'ai craqué, je commence le septième guerrier mage...
Encore un que j'ai adoré !!
La narration à la première personne surprend au début, faut que je m'habitue.
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